Lecture actuellement d'un livre du Prix Nobel turc Orahn Pamuk : " D'autres couleurs ". De petits écrits très succints ( 3 à 4 pages maximum ) sur sa vie quotidienne ( dans la première partie de ce récit ), qui me donnent l'occasion de lire à mes enfants, sans que je me presse pour finir ; un vrai moment de bonheur et de détente . Voici ce qu'en dit André Clavel du magazine Lire :Citation de "AndréClavel"
Le Prix Nobel livre dans D'autres couleurs son univers intime, ses déambulations littéraires.
Jamais Orhan Pamuk n'aura été aussi proche de ses lecteurs que dans ce livre-ci, qui est à la fois un bouquet de confessions et un mode d'emploi de lui-même. "J'ai toujours pensé qu'il y avait en moi un graphomane intraitable, une créature dévorée par un insatiable besoin de traduire l'existence en mots", prévient le Nobel 2006 au seuil D'autres couleurs, une promenade dans des jardins secrets où se croisent souvenirs de famille, anecdotes intimes, hommages littéraires à ses maîtres et confidences sur les jouvences de l'art d'écrire, lorsqu'il devient un art de vivre. D'abord, il y a le quotidien, qui est pour Pamuk une formidable invitation à fabuler : une balade avec sa fille Rüya dans les rues d'Istanbul, la silhouette d'un bateau sur le Bosphore, une mouette qui meurt sur le rivage, une séance chez le barbier, cela suffit pour que la machine romanesque se mette en route, transformant les instants les plus banals en épiphanies radieuses, "ces curieux moments où la vérité affleure et semble soudain s'illuminer".
D'un texte à l'autre, Pamuk butine son époque et fait son miel avec l'air du temps en répétant qu'il est le plus malheureux des hommes s'il n'a pas sa dose - trois ou quatre heures d'écriture par jour. Les rêves, ajoute-t-il, sont "le remède de l'écrivain", et il raconte à quel point fut chamboulé ce petit monde onirique qui lui sert de tour d'ivoire lorsqu'il dut comparaître devant les tribunaux turcs, en 2006, pour avoir rappelé la responsabilité de son pays dans le génocide arménien. "Pendant le procès intenté contre moi, j'ai été incapable de retrouver cette candeur enfantine sans laquelle on ne peut écrire de romans", dit Pamuk.
Quant à son musée imaginaire, c'est une citadelle de papier où se côtoient Les mille et une nuits et Tristam Shandy, Hugo et Dostoïevski, Nabokov et Camus, Thomas Bernhard et Salman Rushdie, auxquels l'auteur de Mon nom est Rouge consacre près d'un quart de ses réflexions avant de lancer quelques fusées de détresse en direction de l'Europe et de commenter ses propres romans - des livres, dit-il, qui "sont ma vie". Ce recueil se referme sur un quai de gare - celui de la célébrité - avec "La valise de mon papa", titre du discours que Pamuk prononça devant les jurés du Nobel. Pas de meilleur autoportrait que ce florilège écrit à coeur ouvert, et aussi chatoyant que les eaux du Bosphore.