Donc, j'ai fini de regarder Princess Tutu ce week-end.
L'histoire, toute simple en apparence, est celle d'un caneton amoureux d'un Prince qui reçoit la visite de l'énigmatique Drosselmayer. Ce dernier lui offre un pendentif ayant le pouvoir d'exaucer ses vœux en partie, à savoir prendre une forme humaine (et accessoirement de devenir Princesse Tutu, version ballerine de Sailor Moon). De là, notre héroine va rentrer dans une école de ballet pour approcher ledit Prince et tenter de lui rendre son sourire, car il souffre visiblement d'un lourd secret.
Sous des atours naïfs à la limite du niais, comme le leitmotiv du chat professeur menaçant ses élèves de les épouser, Princess Tutu est en réalité une série de Magical Girl extrêmement élaborée, truffée de références, au scénario très fouillé et à la bande-son magistrale. Si les premiers épisodes suivent une trame relativement simple et convenue (retrouver les morceaux du cœur du Prince), ils posent les jalons pour le développement ultérieur des personnages, personnages en réalité inspirés des pages les plus poignantes du répertoire classique (larmes pratiquement garanties sur les derniers épisodes de la saison 2) : Siegfried, Odette et Odile pour n'en citer que quelques uns.
Répertoire classique, donc, qui imprègne toute la série. Qu'il s'agisse de célèbres extraits de ballet (les trois grands de Tchaikovsky, mais aussi Giselle, Coppélia, etc.) ou de pièces du grand répertoire symphonique (Schéhérazade, Tableaux d'une exposition, Carnaval des animaux, Ouverture Egmont, extraits du Ring, etc.) ou pianistique (beaucoup de Chopin, du Mendelssohn, du Schumann, etc.), la bande-son est évidemment classique mais chaque épisode possède en outre son propre thème en sous-titre et qui donne le la du visuel, de l'ambiance sonore et de l'intrigue (On the Night of the Fire Festival - Catacombes tourne autour de la lumière dans les ténèbres, A Midsummer Night's Dream a pour personnage principal un âne nommé Bottom, et ainsi de suite).
L'autre grande source d'inspiration de la série est l'univers des contes de fée. La chose est évidente de par la section narrée ouvrant chaque épisode à grand renfort d'il était une fois, ou la présence d'un Prince (et d'un terrible monstre œuvrant dans les ténèbres) voire la coexistence d'animaux anthropomorphes avec des gens "normaux", mais la réalité est encore plus subtile et ne se dévoile que petit à petit (ah, la révélation de l'épisode Crown of Stone - La grande porte de Kiev !).
On n'échappe pas aux poncifs sur l'amitié et le sens du sacrifice pour une telle série, mais l'intrigue à tiroirs est si bien menée, avec ses faux-semblants, ses multiples niveaux de narration entrelacés, son tragique sous des atours puérils, que l'on passe un moment charmant, rafraîchissant et véritablement touchant, pour peu que l'on décide de se prendre au jeu.
Si la série n'est pas aussi fouillée et adulte qu'Utena (mais quelle série le pourrait ?), elle n'en tire pas moins son épingle du jeu. Son cocktail étrange de noirceur sous des dehors enfantins a clairement influencé Madoka a plus d'un niveau. Bref, si vous êtes fatigués des shônen clonés à l'infini avec leurs personnages insipides redesignés pour les plus jeunes générations (suivez mon regard), essayez donc une bouffée de féérie. :)