Potes 'n' Roll !

La Fontaine => Voyages & découvertes => Discussion démarrée par: Ness le 26 Juillet 2005 à 12:30

Titre: Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 26 Juillet 2005 à 12:30
Voilà un topic qui manquait au rayon culture......   

bon, Dam's, au lieu de flooder : au boulot !

apprends-nous quelque chose    :Msn:   :punk:   :Msn:
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 26 Juillet 2005 à 14:53
'Va y avoir du transfert dans l'air ^^ ... j'en profiterais ensuite pour évoquer d'autres sujets  :smile:

D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 26 Juillet 2005 à 14:55
Merci Damien   :partytime:
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 28 Juillet 2005 à 10:55
En attendant les transferts, petite visite de l'esplanade Sacrée de Jérusalem :)

Un plan d'ensemble(http://www.passia.org/palestine_facts/pdf/pdf2004/Jerusalem/Jerusalem-Old-City.pdf)

(http://chemins.eklesia.net/terresainte/israel/moriah4.jpg)

Le mont du temple (en hébreu, Har Habayit, en arabe Haram esh Sharif, le Noble Sanctuaire) est identifié dans les traditions juives et islamiques comme le mont Moriah où Abraham offrit son fils en sacrifice (Genèse, 22: 1-18 ; Coran, sourate al Saffat; 37:102-110).

C'est là que, il y a près de 3.000 ans, le roi Salomon construisit le premier Temple qui fut détruit par les babyloniens en 586 avant notre ère. Sous le règne d'Hérode, les juifs rentrent d'exil et édifièrent le second Temple au même endroit. Des traces iconographiques sont visibles sous forme de fresques murales dans une synagogue du IIIe siècle découverte en 1932 et située à Doura-Europos en Syrie

(http://www.gregwolf.com/map-temple-and-tabernacle-450.jpg)

Dans la tradition musulmane, ce site est identifié comme le sanctuaire éloigné (Masjid al Aksa) d'où le prophète Mohammad, accompagné de l'Archange Gabriel, effectua le voyage nocturne vers le trône de Dieu (Coran, sourate al Isra, 17:1).

Après la destruction de Jérusalem en 70, le site est laissé à l'abandon par les Romains puis les Byzantins. En 638, la cité est conquise par le calife musulman Omar ibn al Khattab qui ordonna le déblaiement du site et la construction d'une maison de prière.

Une cinquantaine d'année plus tard, le calife umeyyade Abd al Malik édifia le Dôme du Rocher pour abriter un rocher qui aurait servi au sacrifice d'Isaac par Abraham sur le mont Moriah. Ce calife, (ou son fils, al Walid I) construisit aussi la grande mosquée située à l'extrémité sud du Haram el Sherif, appelée par la suite el Aksa, d'après le nom coranique attribué à l'ensemble du site.

L'accès à cette esplanade fut longtemps interdit aux non-musulmans jusqu'au milieu du XIXe siècle avec la visite du prince de Galles, le futur Edouard VI, en 1862.

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Le Dôme du Rocher (Qubbat al Sakhra)

(http://gallery.sjsu.edu/IslamicTutorial/DomeofTheRock/01008.JPG)

Édifiée entre 687 et 692 sur ordre du calife umeyyade Abd el Malik, il est le plus ancien monument religieux connu est sert de reliquaire pour le rocher sacré, également nommé la Pierre de fondation.

(http://maratray.chez.tiscali.fr/images/religion/islam/rocher.jpg)

En effet, Ce serait depuis cet endroit que le Prophète aurait effectué son ascension vers le ciel (Miraj) sur une monture céleste (Al Buraq, l'Éclair) mais aussi le lieu du sacrifice d'Isaac par Abraham, la pierre où l'Arche d'Alliance repose dans le Saint des Saints et enfin la zone où se dressait vraisemblablement l'autel des sacrifices du Temple juif édifié par le roi Salomon. Ce monument, détruit par Nabuchodonosor en 586 avant notre ère, est rebâtit par Hérode avant d'être à nouveau rasé par les Romains en 70. En 638, le calife Omar ibn al Khattab fit érigé une austère mosquée de bois.

Les raison de sa construction visaient probablement à éclipser les églises chrétiennes, notamment celle du Saint-Sépulcre, mais également détourner le pèlerinage de la Mekke où un rebelle, Abdullah inb al Zubayr, s'était emparé du pouvoir.

Le monument octogonal dans lequel s'inscrivent deux déambulatoires concentriques, est bâti sur l'Esplanade Sacrée (Haram el Sherif) et est dominé par une coupole en bois à double coque de 20 mètres de diamètre, portée par un haut tambour percé de seize fenêtres. Ce dôme est supporté par un tambour formé d'un cercle de colonnes provenant de temples romains. Les feuilles d'or du dôme de cuivre ont été restaurées en 1994. Cette technique des coupoles en bois, d'origine typiquement syrienne, remonte aussi bien à la basilique byzantine de Saint-Siméon le Stylite (Qalat Seman) qu'à la cathédrale de Bosra.

L'édifice est doté en outre de quatre portes d'accès, ouvertes dans les murs extérieurs de l'octogone et regardant vers les poins cardinaux.

La décoration extérieure, constituée de panneaux de marbre en partie basse et de revêtements de céramiques colorées en partie haute, est le fruit de dons et de restaurations d'époques diverses, en particulier sous le règne de Soliman le Magnifique. Les carreaux extérieurs ont été restaurés pour la dernière fois en 1963.

(http://ebaf.op.org/phototq/images/alquds/01629ter.jpg) (http://www.muslimuzbekistan.com/eng/ennews/special/masjid/images/aqso_dome_of_rock0016.jpg)


L'intérieur présente une arcade, où alternent trois colonnes pour un pilier et comportant seize arcs, qui supporte le dôme. Une seconde arcade, octogonale celle-là, l'entoure. Elle est formée d'alternances de deux colonnes pour un pilier d'angle et compte ainsi vingt-quatre arcs.

L'espace abrite des remplois de colonnes antiques en marbre, en granit ou en porphyre de couleurs diverses et des chapiteaux corinthiens dorés supportant des arcs à claveaux alternés noirs et blancs.

De nombreuses mosaïques à la manière byzantine figurent des pampres et des ramures jaillissants, sur fond d'or, de canthares, ou vases contenant originellement l'eau lustrale, symboles d'immortalité. Ce décor se complète d'un riche parement de marbre, travaillé à la manière de placage à veinures symétriques, également polychromes.

Enfin, ce dôme renferme en ses murs la première citation coranique connue : il s'agit d'une frise épigraphiée de deux cents quarante mètres de long et qui domine l'ensemble du décor de l'octogone intérieur. Elle donne, outre la date de 691, des textes portant sur la reconnaissance de Jésus et de Marie, les chrétiens comme faisant partie des "gens du Livre", le voyage nocturne de Mohammad ou encore l'affirmation que seule la vraie Foi est celle révélée au prophète de l'Islam.

Ce monument forme un symbole de l'unité et de la continuité de la foi abrahamique, juive, chrétienne et musulmane.

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La mosquée al-Aksa

(http://www.ithaca.edu/faculty/rlesses/Al%20Aksa%20mosque.jpg)
(http://www.templemount.org/graphics4/Fig27b-4.gif)

Il s'agit à l'origine d'une basilique chrétienne construite par l'empereur Justinien (527-565) en l'honneur de la Vierge. Réaménagée en mosquée en 715, le bâtiment subit un tremblement de terre en 785 avant de faire l'objet d'une importante restauration en 1187 sous le règne de Saladin. Les opérations de conservation et de préservation les plus récentes remontent à 1938-1942. Elle reprendront à titre exceptionnelle en 1969 et réparer les dégâts importants d'un incendie criminel qui détruisit entre autre un minbar  incrusté de bois de cèdre qui avait été offert par Saladin.

Le nom de la mosquée provient d'un verset de la sourate 17 du Coran : "La plus éloignée".

L'édifice est composé d'une large nef axiale, allant de la façade vers le mur du fond, où se creuse la niche du mihrab, qui est accosté de sept nefs latérales (quatorze bas-côtés au début du VIIIe siècle).

Les charpentes qui couvrent le vaisseau médian sont décourées de panneaux sculptés, datables de l'époque des Umayyades.

Des retouches ont été effectuées à partir du XIIe siècle avec l'aménagement d'un transept dans le fond de l'oratoire et de l'élévation d'une coupole en avant du mihrab.

Les parties visibles les plus anciennes sont d'époque fatimide (façade, abside et mosaïque de l'arc). les autres structures datent des Croisades ou sont modernes. Elles imitent le style de la construction primitive.

Saladin l'Ayyubide rajoute une medersa à la mosquée.

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Et pour finir, le Mur des Lamentations

(http://www.atviews.com/images/mur_des_lamentations_0112bb.jpg)

Haut de quinze mètres, ce mur forme une frontière avec le quartier juif et est constitué d'immenses blocs de pierre de taille surmontés par une maçonnerie datant des époques mamelouks et turques.

Il est l'unique vestige du Temple de Jérusalem du roi Salomon (950 avant notre ère) reconstruit par Hérode avant d'être pillé et incendié par les troupes romaines de Titus en septembre 70, conformément à une prophétie donnée par Jésus dans l'Évangile selon Matthieu (24:2) : "Comme Jésus s'en allait, au sortir du temple, ses disciples s'approchèrent pour lui faire remarquer les constructions. Voyez-vous tout cela ? Je vous le dis en vérité, il ne restera pas ici pierre sur pierre qui ne soit renversée."

Le temple est finalement détruit par les Romains en 135, et les juifs sont chassés de la ville. Seul subsiste ce mur de soubassement du temple dont sa place est actuellement occupée par le Dôme du Rocher. Les juifs y viennent y pleurer les malheurs de leur peuple.

Des fouilles au XIXe siècle ont constaté que le mur se poursuit 15 mètres en dessous du sol. Il est prévue d’abaisser le niveau de l’esplanade afin d’exposer le mur dans toute sa grandeur. Il s’agit d’une tâche délicate et complexe qui pourrait, selon les estimations, exiger vingt ans de travaux.

De 1948 à 1967, l'occupation jordanienne interrompit les pèlerinages. Ils reprirent avec une ampleur extraordinaire après la Guerre des Six Jours, qui fit passer toute la ville sous le contrôle israëlien et, dégageant les abords du mur, transformèrent l'étroit cul-de-sac en une vaste promenade.


D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 28 Juillet 2005 à 13:13
aaaaaaaaaaaaahhhhhhhhh....    ça fait du bien...   merci Dam's....     :yaisse:
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 4 Août 2005 à 14:58
ALEP

(http://babsouria.online.fr/photohq/p02018.jpg)

Une ancienne carte de la ville(http://www.lib.utexas.edu/maps/historical/aleppo_1912.jpg)

Ville de la Syrie septentrionale située sur la grande route de caravanes passant par Babylone et qui fut au second millénaire avant notre ère un des centres de l'Empire hittite.
Le premier texte mentionnant Alep, dans les archives hittite d'Hattousa (Bogazköy) la fait remonter au XXe siècle avant notrer ère, "mais comme elle est alors la capitale d'un État d'une certaine importance, l est évident qu'elle a derrière elle, dès cette date reculée, un très long passé [...]; nous sommes ici devant l'une des plus anciennes villes du monde qui soient encore habitées et florissantes." (J. Sauvaget, "Alep. Essai sur le développement d'une grande ville syrienne des origines au milieu du XIXe siècle", Paris, 1941). Les éléments de cette pérennité sont sans doute la position défensive exceptionnelle que constitue sa citadelle et le fait qu'elle est située au coeur d'une région prospère. Son rôle historique tient à la position stratégique qu'elle occupe, entre l'Anatolie et le plateau syrien, rôle qu'elle joua particulièrement au cours de trois conflits : entre Byzantins et Sassanides, entre Byzantins et musulmans, entre croisés et musulmans.

Alep passa sous domination assyrienne (738 avant notre ère), perse (conquête de Cyrus en 539 siècle avant notre ère) et séleucide (IVe siècle avant notre ère). Ces derniers y fondèrent de 301 à 281 la nouvelle ville (en grec Béroia).
Conquise par les Romains en 65 avant notre ère et intégrée à l'Empire byzantin, Alep fut plusieurs fois détruite par des tremblements de terre. En 540, Chosroès incendie la ville que Justinien reprend et rebâtit. En 637, les troupes arabes commandées par Hâlid ibn al Walid s'en emparèrent. La ville connait ensuite une certaine stagnation jusqu'en 944 où elle devient la capitale du Hamdânide Sayf al Dawla. L'activité de l'émir en fait un prestigieux centre littéraire et le point chaud de la lutte entre les musulmans et les byzantins. A de brillants succès obtenus au cours de rapides incursions en territoire byzantins succèdent de lours revers : en 962, Alep est prise et incendiée par Nicéphore Phocas. La ville est reprise et reconstruite sans recouvrer sa splendeur puis tombe aux mains des Seldjoukides en 1078.

Vainement assiégé par les Croisés en 1124, elle fut prise par Saladin en 1183. Sous les Ayyubides, Alep est un grand centre de vie intellectuelle et religieuse , de nombreuses madrasa y sont élevées; sa citadelle et ses muraillles sont rebâties. Cependant, elle ravagée par les Mongols en 1260, 1280 et 1400 avant de devenir turque en 1517. Elle devient à partir du XVe siècle une grande place commerciale entre l'Orient et l'Occident, pratiquement surtout le commerce de la soie. Au XVIIe siècle, le déclin des voies commerciales terrestres entrel'Extrême-orient et le Proche-Orient entraîne celui de la ville.

Au XIXe siècle, Alep joue un rôle dans la renaissance arabe : c'est de la cité qu'est originaire le grand réformateur al-Kawakibi. Occupée par les Égyptiens de 1832 à 1840, puis par les Britanniques en octobre 1918, elle constitue un territoire autonome de 1920 à 1924 avant d'être englobée dans la Syrie sous mandat français. Après l'évacuation des troupes françaises en 1945, elle fut d'abord capitale d'un des Etats syriens avant de devenir chef-lieu d'une des province dela République de Syrie.

Actuellement; Alep est le seconde ville de la Syrie et retrouve son ancienne activité commerciale ; son artisanat traditionnel est toujours florissant. On y trouve de nombreuses industries : transformation des produits agricoles de la plaine voisine, filatures, tissage.


Sa citadelle :

(http://www.unepetiteplanete.net/Syrie/citadelle.jpg)

Construite sur une colline à l'époque hittite ou assyrienne pour servir d'acropole au début du premier millénaire avant notre ère, la citadelle surplombe des rochers d'une cinquantaine de mètres de haut dont les flancs ont été régularisés de main d'homme. Elle est située sur une colline de 450 mètres de long et 325 mètres de large. Elle est entourée d'une fosse large de 30 mètres et de 22 mètres de profondeur creusé au XIIe siècle.

Cette forteresse militaire destinée à protéger les champs agricoles des alentours fut reconstruite à plusieurs reprises dès la conquête arabe de 637. Les Séleucides y édifièrent une première forteresse ainsi q'un temple pour le dieu syrien Hadad. Au Xe siècle, le prince Sayf al Dawla (944-967) y habita, puis le siècle suivant vit le grand prince d'Alep, Nour ed Din (1147-1174), y séjourner avant que Al Zâhir al Ghâzi (1186-1216), fils de Saladin, ne prenne la place au XIIe siècle. Durant la première décennie du XIIIe siècle, la citadelle sert de lieu résidentiel (palais et bains), religieux (mosquée) et militaire (arsenal de défense, fossé). Son aspect actuel général date de la seconde moitié du XIIIe siècle, après la destruction du site par les Mongols.

A ce titre, la grande mosquée de la citadelle est l'oeuvre d'Al Zâhir al Ghâzi en 1214 qui est placée au plus haut lieu de la colline fortifiée avec son minaret de 21 mètres. Ce dernier joue également un rôle militaire et permet d'avoir une vue d'ensemble d'Alep et ses environs sur plusieurs kilomètres.

L'entrée de la citadelle est un des plus beaux ouvrages militaire du Moyen-Orient demeuré intact. Elle fut érigée dans les dernières années du XIIe siècle par Al Zâhir al Ghâzi. On accède à la porte d'entrée par un pont supporté par huit arches élancés que défendait un ouvrage avancé surmonté d'une bretèche au-dessus de l'entrée. Deux grandes tours commandent l'extrémité du pont. La grande porte est située de côté pour que les assaillants ne puissent pas l'enfoncer du pont à l'aide de béliers.

Le pont franchi, il faut suivre les cinq coudes d'un couloir coupé de trois portes. A remarquer sur les portes des bas-reliefs représentant des serpents et des lions. A droite, on peut voir l'entrée de la salle du trône qui fut rattachée aux deux tours au XVe siècle.

A l'intérieur de la citadelle, sur la droite, une salle souterraine servait de citerne aussi bien que de prision, puis, sur la gauche, la mosquée d'Abraham (1167). De l'autre côté de la citadelle au Nord, on peut voir les vestiges de la Grande Mosquée construite par Zâhir Ghâzi, avec son minaret de 21 mètres de haut. Il existe encore une fontaine de 60 mètres de profondeur et datant du XIIIe siècle.

En 1986, elle est intégrée au patrimoine mondial sous l'égide de l'UNESCO avant de faire l'objet d'une restauration depuis 2000 notamment au niveau du palais ayyubide et des murs de fondation.


Et enfin, sa Grande Mosquée :(http://img201.imageshack.us/img201/2825/alepmosquee01web5kc.jpg)

Elle fut fondée en 715 sous la dynastie des Umeyyades et reconstruite vers 1175 après un incendie. A cet emplacement s'élevait jadis une cathédrale byzantine. Son nom se réfère à Zacharie, père de Jean-Baptiste.

Le minaret,(http://babsouria.online.fr/photohq/p02012.jpg) commencé en 1090 sous le règne de Malik Shah, achevé en 1095 sous celu del'atabeg Tutush, demeure un des rares vestiges syriens de l'époque seldjoukide. Haut d'une cinquantaine de mètres, élevé sur plan carré selon la tradition syrienne, il est divisé en cinq étages :

1) L'étage inférieur, sans aucune décoration, est surmonté d'un entablement tripartite dont la frise porte un texte en caractères coufiques fleuris attribuant la construction à Malik Shah : "Au nom d'Allah [...] a été reconstruit à neuf ce minaret sous le règne de notre maître, le sultan auguste, roi des rois suprêmes, le seigneur des peuples, le maître des Arabes et des non-Arabes, le sultan de la terre d'Allah, le pilier de l'Islam et des musulmans, abul-fath Malik Shah, fils de Muhammad, le bras droit de l'émir des croyants _ qu'Allah glorifie sa souveraineté".

2) Le second étage, cantoné de pilastres à rainures, est orné sur chaque face d'une moulure trilobée.

3) Le troisième étage présente un entablement avec une rangée de petites conques sur l'architrave, une inscription en caractères naskhis sur fond de rinceaux sur la frise et un mince bandeau denticulé sur la corniche.

4) Le quatrième étage présente sur chaque face deux arcs surhaussés à sept lobes enserrant chacun un petit oculus entourée d'une moulure à six lobes. Au-dessus, la frise porte un texte de dévotion au douze imams.

5) Au centre des côtés du cinquième étage, une grande fenêtre rectangulaire s'ouvre au-dessus d'un garde-corps ajouré. Un ruban mouluré en rehausse l'embrasure, s'épanouit en arc trilobé au-dessus de la baie et s'enroule autour d'arêtes. La frise dont le texte évoque l'achèvement du monument sous le règne de Tutush est surplombée d'une corniche fortement saillante.

6) Au sixième étage, un petit édicule de pierre dissimule l'arrivée de l'escalier intérieur.

Selon E. Hezfeld, "ce minaret érigé juste avant la premier croisade est d'une importance unique. D'n côté il nous permet de reconnaître comme représentants d'une grande unité et d'une norme, les monuments, autrement isolés et incompréhensibles, du onzième siècle en Égypte, en Syrie et en Mésopotamie, et ceux qui continuent cette tradition durant le douzième siècle. Malgré toutes les transformations qu'elles a subies, cette architecture est enconre essentiellement antique [...]; elle est un produit de la civilisation de la Méditerannée. En dessinant le développement des quatre côtés de ce minaret sur le même plan, on croit voir la façade d'un palazzo vénitien. [Il] symbolise l'impression que le contact musulman a produite, pendant les croisades, sur l'esprit européen."

Dans la salle de prières, le minbar du XVe siècle est en bois sculpté et, à gauche du mihrab, on peut voir le tombeau supposé de Zacharie, père de Saint Jean-Baptiste.


D's©
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Kianouch le 4 Août 2005 à 14:59
Redimensionne les images et utilise ImageShack au lieu de hotlinker  :smartass:
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Flavien le 4 Août 2005 à 15:21
Ce sont des comptes rendus que tu as fait pendant tes classes ?
Titre: Re : Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 4 Août 2005 à 15:24
Citation de strangler le 4 Août 2005 à 15:21
Ce sont des comptes rendus que tu as fait pendant tes classes ?
Non, pourquoi ?

D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Flavien le 4 Août 2005 à 15:26
Bah je te demande, car c'est quand même sacrément volumineux ^^
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 4 Août 2005 à 15:34
Citation de strangler le 4 Août 2005 à 15:26
Bah je te demande, car c'est quand même sacrément volumineux ^^
Tu trouves ?

Moi pas.

Bon, parle nous du musée où tu te trouves, de son histoire et des objets remarquables qu'il possède, ça m'intéresse !

D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Flavien le 4 Août 2005 à 18:12
Oui, c'est vrai que ce n'est pas une thèse...

Je commence le 16. Pour faire une brève présentation, il se concentre sur la période de l'Occupation (donc juin 40-juin44), sur la résistance corrézienne, la personnalité d'Edmond Michelet et la propagande de l'époque (apparement pro-nazi et anti-nazi, une collection de 380 objects, ce qui serait unique en France).

On verra en détail quand j'y serai puisque je dois participer (modestement vu que celà ne dure que deux semaines) à la transformation de ce musée en musée d'histoire. (ce que je rappelais dans 36-15 ma vie). Ce qui est amusant, c'est que le directeur (il ne s'est pas proclamé conservateur) est assez jeune (il n'a pas l'air de dépasser les 35 ans) et a une formation historienne.

 
Titre: Re : Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Bilal le 4 Août 2005 à 18:27
Citation de Damien le 28 Juillet 2005 à 10:55
Une cinquantaine d'année plus tard, le calife umeyyade Abd al Malik édifia le Dôme du Rocher pour abriter un rocher qui aurait servi au sacrifice d'Isaac par Abraham sur le mont Moriah. Ce calife, (ou son fils, al Walid I) construisit aussi la grande mosquée située à l'extrémité sud du Haram el Sherif, appelée par la suite el Aksa, d'après le nom coranique attribué à l'ensemble du site.
Attention Damien, dans la religion Musulmane ce n'est pas Isaak qu'Abraham à failli sacrifier mais Ismaël ;)
Citation
Enfin, ce dôme renferme en ses murs la première citation coranique connue : il s'agit d'une frise épigraphiée de deux cents quarante mètres de long et qui domine l'ensemble du décor de l'octogone intérieur. Elle donne, outre la date de 691, des textes portant sur la reconnaissance de Jésus et de Marie, les chrétiens comme faisant partie des "gens du Livre", le voyage nocturne de Mohammad ou encore l'affirmation que seule la vraie Foi est celle révélée au prophète de l'Islam.
Premières citation ? tu veux parler des premiers verset du Coran ? La 1ere Sourate (chapitre) révélé fut "Sourat al Iqra'" alors quand dans les Calligraphies extérieur il est pas questions de cette sourate...
Citation
Il s'agit à l'origine d'une basilique chrétienne construite par l'empereur Justinien (527-565) en l'honneur de la Vierge. Réaménagée en mosquée en 715, le bâtiment subit un tremblement de terre en 785 avant de faire l'objet d'une importante restauration en 1187 sous le règne de Saladin. Les opérations de conservation et de préservation les plus récentes remontent à 1938-1942. Elle reprendront à titre exceptionnelle en 1969 et réparer les dégâts importants d'un incendie criminel qui détruisit entre autre un minbar  incrusté de bois de cèdre qui avait été offert par Saladin.
A noter que ces mosquées sont devenue des Eglises pendant les croisades, enfin jusqu'a la reconquete par Saladin.
Citation
Le nom de la mosquée provient d'un verset de la sourate 17 du Coran : "La plus éloignée".
Oui c'est la sourate qui raconte l'ascension du Prophète Mahomet vers les cieux.



Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 5 Août 2005 à 08:47
Citation
Premières citation ? tu veux parler des premiers verset du Coran ?
Non, non. Je disais que c'était la première fois qu'apparaîssait une décoration calligraphique dans l'histoire de l'art musulman.

Merci pour la correction concernant Ismaël

Tu sembles trés intéressé par tout ce qui touche l'histoire de ta religion, c'est bien !

D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 5 Août 2005 à 23:53
pour Dam's : la Toscane (Sienne & Voltera)

où le temps s'arrête subitement au détours d'une ruelle pour ouvrir ses portes sur un subtil mariage entre l'antiquité, le moyen-âge et la renaissance ....  un parfum de dolce vita, de grandeur, faste envahisent notre esprit.....  et des souvenirs d'un coin de paradis restent dès lors grâvé dans notre mémoire

photos à l'appui !

Sienne :

[img=http://img97.imageshack.us/img97/953/campo8rz.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=campo8rz.jpg)

[img=http://img97.imageshack.us/img97/9743/sienacampo6kb.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=sienacampo6kb.jpg)

[img=http://img97.imageshack.us/img97/7065/sienne6pk.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=sienne6pk.jpg)

http://img238.imageshack.us/img238/5185/thumbsiennapalazzopubblicopiaz.jpg

[img=http://img97.imageshack.us/img97/1384/villesterresiennetoscaneitalie.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=villesterresiennetoscaneitalie.jpg)

Voltera :

[img=http://img97.imageshack.us/img97/2515/017volterra0gm.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=017volterra0gm.jpg)

[img=http://img97.imageshack.us/img97/6913/toscanavoltera04300x22549ha.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=toscanavoltera04300x22549ha.jpg)

[img=http://img97.imageshack.us/img97/8808/volterakap018tw.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=volterakap018tw.jpg)

[img=http://img97.imageshack.us/img97/1103/voltera2m5kq.th.jpg](http://img97.imageshack.us/my.php?image=voltera2m5kq.jpg)

http://img233.imageshack.us/img233/9695/images5cvoltromanthtr9ux.jpg
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 6 Août 2005 à 16:58
Les Scythes : Peuple oublié

« Quand la peau est détachée du crâne, on la courroie à la main avec une côte de bœuf ; elle devient souple et le guerrier [scythe] s’en sert comme d’une nappe d’étoffe ; il la porte devant lui, suspendue à la bride de son cheval ; il s’en glorifie. Celui qui possède le plus de ces petites nappes de peau est réputé le plus vaillant. Plusieurs font de ces peaux des vêtements qu’ils cousent à la manière des casaques de cuir. (…) Tels sont, à ce sujet, leurs usages. »

Hérodote, Histoires


« Quel étrange peuple est-ce là ? » C’est la question qu’a dû se poser Darius, le roi des Perses, après avoir vu ses ennemis scythes délaisser les affaires sérieuses de la guerre pour disparaître brusquement à la poursuite d’un lièvre qu’ils avaient aperçus.

La même interrogation persiste dans l’esprit des hommes modernes civilisés alors que la recherche nous en fait savoir davantage sur cette étrange coutume des cavaliers nomades eurasiens.

De nouvelles études et l’examen de milliers de sites funéraires depuis vingt ans, dans la Russie du Sud et dans l’Altaï, nous ont permis de nous former une image bien plus complète de ce vigoureux peuple nomade amateur de chevaux et inventeur d’un style d’art animalier unique, cette race hors du commun qui a transmis au monde civilisé l’usage du pantalon et l’art de l’équitation.

(http://img150.imageshack.us/img150/5278/scyarcher6fe.th.jpg)(http://img150.imageshack.us/my.php?image=scyarcher6fe.jpg)

Le pays du mythe et de l’or

Le trait le plus frappant chez les Scythes est peut-être l’énorme quantité d’or qu’ils portaient sur eux et qu’ils utilisaient. La tradition antique nous raconte l’histoire des Arimaspes de Scythie, le peuple des hommes à un seul œil menant une guerre perpétuelle avec les griffons gardiens de l’or. Cet or provient sans nul doute des riches gisements de la région de l’Altaï. Les Scythes portaient couramment des parures et des ceintures dorées. Des plaques d’or étaient cousues à leurs vêtements et leurs armes scintillaient d’or. Les quantités d’offrandes d’or recelées par les grands tertres funéraires des rois scythes font toujours l’étonnement des archéologues.

D’où venaient-ils ? La tradition scythe les décrit comme descendant des trois fils d’un certain Targitas, un homme à la naissance surnaturelle habitant la région de la mer Noire. Ces trois frères gouvernaient ensemble le pays lorsque quatre ustensiles d’or, une charrue, un joug, une hache de bataille et une coupe, tombèrent du ciel et commencèrent à s’embraser. Colaxaïs, le plus jeune des trois frères, fut le seul d’entre eux à pouvoir à ramasser ces objets brûlants, ce qui fit de lui le seul maître du royaume des Scythes.

Une autre légende fondatrice nous est racontée par Diodore de Sicile au premier siècle avant notre ère. Les Scythes vivaient d’après lui « en très petit nombre près de l’Araxe…[et] s’établirent dans un pays comprenant les montagnes allant jusqu’au Caucase, les plaines côtières près de l’Océan (la mer Caspienne) et du lac Mœtis (la mer d’Azov), et d’autres territoires s’étendant jusqu’au Tanaïs (le Don). Scythès naquit de l’union de Zeus et d’une déesse mi-femme mi-serpent et donna le nom de Scythes à son peuple. » Ses descendants, nommés Pal et Naps, furent les ancêtres de deux peuples apparentés, les pals et les naps. « Ils se conquirent un pays derrière le Tanaïs et s’étendant jusqu’au Nil égyptien. » (Diodore II, 43).

(http://img150.imageshack.us/img150/4104/ordesscythes5yk.th.jpg)(http://img150.imageshack.us/my.php?image=ordesscythes5yk.jpg)     

Histoire

Il est problématique de dater l’évolution des premiers Scythes dans la mesure où ils n’ont créé leur style d’art distinctif qu’au VIe siècle avant Jésus-Christ. A. I. Melioukova a suggéré qu’ils descendaient de tribus de culture srubnaya qui, entre le milieu du second millénaire et la fin du VIIe siècle avant notre ère, se sont déplacées en plusieurs vagues des steppes situées entre la Volga et l’Oural vers le nord de la mer Noire, où ils assimilèrent les Cimmériens installés dans la région. Les Scythes apparaissent pour la première fois dans l’histoire au VIIe siècle comme les alliés des Assyriens contre les Cimmériens, qu’ils avaient eux-mêmes refoulés vers le Sud en s’installant sur leur territoire. Le roi scythe Bartatoua épousa une princesse assyrienne en 674 avant Jésus-Christ et les deux peuples demeurèrent alliés. Les Scythes et les Assyriens vainquirent ensemble les Mèdes de la mer Caspienne. Mais ces derniers parvinrent à les chasser d’Asie occidentale et à les faire revenir dans les steppes pontiques à la fin du siècle.

Un événement très important, dont Hérodote nous fait un compte rendu détaillé, se produisit dans la steppe en 514 avant Jésus-Christ. Le troisième grand roi des Perses, Darius, décida d’envahir la Scythie. Commandée par Darius lui-même, une armée perse de 700 000 hommes traversa le Danube en direction des steppes russes. Les Scythes prirent le parti de battre en retraite devant leurs poursuivants perses et Darius ne parvint pas à les forcer à affronter son armée en bataille rangée. Les Scythes persévérèrent dans leur tactique de repli et, lorsque Darius demanda à leur roi de combattre, celui-ci lui répliqua :
« Je n’agis pas aujourd’hui autrement que selon ma coutume, même pendant la paix ; je vais, au reste, t’apprendre pourquoi je ne te livre pas bataille incontinent. Nous ne possédons ni villes, ni campagnes cultivées pour lesquelles, de peur que tu ne les prennes et ne les ravages, nous soyons pressés d’en venir aux mains. Si toutefois tu veux absolument tenter le sort des armes, nous avons les sépultures de nos ancêtres ; allez, cherchez-les, et si vous les trouvez, essayez de les outrager : vous saurez alors si nous combattrons pour ces sépultures ou si nous ne combattrons pas. »

Darius dut mener une guerre étrange. Il ne pouvait rien capturer ni conquérir, ni ville, ni bâtiment, ni butin, rien que la steppe infinie. Il se battait contre du vent. Il n’eut d’autre alternative que de repartir. Les Scythes harcelèrent constamment son armée jusqu’au Danube. Il n’entreprit plus jamais d’autre campagne au nord en passant par l’Europe et les Scythes dominèrent la steppe russe méridionale et continuèrent au siècle suivant leur expansion vers l’ouest.

De la fin du VIIe siècle au IIIe siècle avant Jésus-Christ, les Scythes occupèrent les steppes du nord de la mer Noire, entre le Don à l’est et le Danube à l’ouest. Une tribu particulière, celle des Scythes royaux, se distingue de toutes les tribus scythes par son rôle dominant, les Scythes nomades, les Callipides, les Alazons, les Scythes cultivateurs et les Scythes laboureurs lui étant soumis. Les Scythes royaux et les Scythes nomades menaient une vie véritablement nomade et les Callipides et les Alazons une existence semi-sédentaire. Les Scythes laboureurs étaient de toute évidence des agriculteurs sédentaires. Hérodote nous dit que les Callipides ou Gréco-scythes vivaient non loin d’Olbia, à l’embouchure du Boug. Au nord, on trouvait les Alazons, puis les Scythes laboureurs, entre le Dniepr et le Boug. Les Scythes nomades avaient pour territoire les steppes de la région de la mer d’Azov et les deux rives du Dniepr. Les historiens pensent pour la plupart qu’ils occupaient les deux rives du Boug inférieur jusqu’à la Konka tandis que les Scythes royaux parcouraient les territoires situés plus à l’est et au sud jusqu’au Don. Enfin, les Scythes nomades de l’Altaï sibérien sont appelés Scythes apparentés ou Scythes orientaux.

Le royaume des Scythes atteignit son apogée économique, politique, sociale et culturelle au IVe siècle avant notre ère. De nombreux nomades se sédentarisèrent au nord de la mer Noire et, les Scythes eurent pour capitale économique, politique et commerciale Kamenskoe Gorodisce durant le IVe siècle et jusqu’à la première moitié du IIIe siècle. Le grand roi Atéas unifia toutes les tribus scythes et étendit son territoire jusqu’à la frontière thrace sur la rive droite du Danube. Atéas fut tué en 339 avant Jésus-Christ, à l’âge de quatre-vingt-dix ans, au cours d’une bataille contre Philippe de Macédoine. Le royaume des Scythes n’en resta pas moins solide et prospère. Aucune menace extérieure ne put le déstabiliser jusqu’à ce que les Celtes et les Thraces l’envahissent à l’ouest, et les Sarmates à l’est, à partir de la deuxième moitié du IIIe siècle avant notre ère. Le royaume scythe fut alors absorbé par d’autres puissances nomades et disparut de l’histoire.

(http://img271.imageshack.us/img271/1563/scymap4cg.th.jpg)(http://img271.imageshack.us/my.php?image=scymap4cg.jpg)  (http://img271.imageshack.us/img271/4512/scycart0wm.th.jpg)(http://img271.imageshack.us/my.php?image=scycart0wm.jpg)


La langue

Les Scythes étaient illettrés et n’ont pas laissé de trace écrite. Hérodote nous a toutefois transmis quelques rares mots scythes. D’après lui, « pata » signifie tuer, « spou » œil, « arima » un, et « oior » homme. Ces quelque mots ont permis aux philologues de définir le dialecte scythe comme une langue indo-européenne préhistorique.

(http://img271.imageshack.us/img271/4267/scythesguerriers0ab.th.jpg)(http://img271.imageshack.us/my.php?image=scythesguerriers0ab.jpg)     
 
La domestication des chevaux

Les Scythes ont été les premiers cavaliers nomades à attirer l’attention des historiens. S’ils n’ont pas été les premiers à domestiquer le cheval, ils ont été parmi les premiers, sinon le premier peuple d’Asie centrale à apprendre à monter à cheval. Leur succès guerrier était dû au fait que leurs soldats étaient des cavaliers. Leur incursion en Asie eut pour conséquence de faire rapidement adopter et maîtriser la technique de l’équitation aux populations de l’ensemble du Moyen-Orient.

Bien qu’utilisant des mors sophistiqués, les Scythes ne connaissaient pas l’usage de l’étrier et chevauchaient sur des tapis de selle, se fiant à leur prise et à leur équilibre. Ils se révélaient néanmoins de redoutables cavaliers lors des combats.

(http://img271.imageshack.us/img271/3000/scyselle5ut.th.jpg)(http://img271.imageshack.us/my.php?image=scyselle5ut.jpg)

Le mode de vie dans les steppes

Les Scythes étaient célèbres pour leurs coutumes tribales sanglantes. Les guerriers ne se contentaient pas de couper la tête de leurs ennemis morts mais faisaient des coupes recouvertes de cuir du crâne de leurs ennemis. Ils bordaient d’or ces trophées macabres et les exhibaient fièrement pour impressionner leurs hôtes. Les Grecs antiques prêtaient à la société scythe un caractère matriarcal que démentent toutefois les découvertes archéologiques. Dominée par les hommes, la société scythe était traditionnellement polygame. Un Scythe riche pouvait prendre plusieurs femmes qui pouvaient à sa mort revenir à son fils ou à son frère. Les femmes scythes voyageaient dans des chariots accompagnées de leurs enfants et n’avaient que peu de pouvoir en dehors de leur foyer, à la différence de leurs voisines Sarmates, qui chevauchaient et combattaient à l’égal des hommes. Certains spécialistes suggèrent cependant qu’elles ont pu mener une vie plus active et plus influente à une certaine époque.

L’abondance du poisson et du gibier empêchait toute pénurie de nourriture. Le régime de base des Scythes consistait en koumis, une sorte de lait de jument fermenté resté populaire en Asie centrale, en de grandes quantités de fromages, et en légumes comme l’oignon, l’ail et les haricots. Ils préparaient la viande en ragoûts. En matière d’hygiène, Hérodote nous apprend qu’ils ne se lavaient pas avec de l’eau, mais que les femmes utilisaient une pâte de cyprès, de cèdre et d’arbre à encens broyés qu’elles s’appliquaient sur le visage et sur le corps : « Ce cataplasme leur donne une bonne odeur ; de plus, lorsque le lendemain elles l’ôtent, elles sont propres et fraîches. » Les Scythes passent pour avoir été passionnés. C’étaient des hommes barbus, aux yeux noirs enfoncés dans les orbites et à la longue chevelure emmêlée par le vent. Ils furent parmi les premiers peuples à porter des pantalons, ce qui s’accordait avec leur style de vie de cavaliers. Ils portaient des bottes souples avec des talons. La dépouille gelée vieille de deux mille ans retrouvée en 1947 en Sibérie nous révèle qu’ils aimaient se recouvrir le corps de tatouages élaborés.

(http://img271.imageshack.us/img271/2269/peigne1sa.th.jpg)(http://img271.imageshack.us/my.php?image=peigne1sa.jpg)
 
La religion

Les Scythes n’avaient ni temple, ni autels ou images religieuses, ni évidemment de prêtres. On sait qu’ils recouraient au chamanisme pour leur pratique religieuse, à l’instar des autres nomades du nord. Les chamans avaient pour rôle de commercer avec le monde des esprits et de conseiller les rois et les chefs. En gens superstitieux, les Scythes croyaient en la sorcellerie, en la magie et dans le pouvoir des amulettes. Les chamans scythes les plus honorés venaient de familles particulières. C’étaient des hommes efféminées appelés Enarées, ce qui signifie « homme-femme » ou demi-homme », qui parlaient d’une voix de fausset et portaient des vêtements de femmes.

(http://img271.imageshack.us/img271/3417/scythes7mi.jpg)(http://imageshack.us)
 
Les rites mortuaires

Chaque décès chez les Scythes donnait lieu à un deuil prolongé et démonstratif. A la mort d’un roi, toutes les tribus observaient un deuil extrême de quarante jours. Les hommes de la tribu dominante, les Scythes royaux, se rasaient les cheveux et se lacéraient les oreilles, le front, le nez et les bras. Après avoir enterré le roi avec ses armes les meilleures et ses biens les plus précieux, on étranglait une de ses concubines, son échanson, son cuisinier, son valet, son messager et ses plus beaux chevaux pour mettre tous ces corps à côté du sien. On recouvrait ensuite la tombe d’un tumulus de vingt mètres.

Les funérailles n’en étaient pas finies pour autant. Un an plus tard, on pouvait choisir jusqu’à cinquante jeunes ayant directement servi le roi pour les étrangler et les enterrer en cercle autour de la tombe royale.

(http://img271.imageshack.us/img271/4381/kourgan2rb.th.jpg)(http://img271.imageshack.us/my.php?image=kourgan2rb.jpg)
 
L’art animalier

Le compte rendu d’Hérodote sur les guerriers scythes comporte une lacune en ne mentionnant pas leur forme d’art, qui témoigne d’une force et d’une vitalité étonnantes.

Les Scythes inventèrent vers le VIe siècle avant Jésus-Christ un style artistique fait de dessins et d’ornements à base de motifs naturalistes animaliers.

Leurs animaux favoris étaient le cerf, le cheval, le bouquetin, le sanglier, l’ours, le loup, les félins, l’aigle et le poisson. Le style animalier des Scythes se répandit chez tous les nomades cavaliers jusqu’aux confins de la Chine à la fin du premier millénaire avant notre ère.

Les sépultures et les tombes scythes nous ont livré une abondance d’objets exceptionnels et d’une grande richesse, notamment dans les sites de Pazyryk, dans les montagnes de l’Altaï en Sibérie du centre-sud, et de Kul Oba, dans le bassin du Kouban au nord de la mer Noire.

(http://img150.imageshack.us/img150/1811/scycavalier8ls.jpg)(http://imageshack.us)


Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 9 Août 2005 à 16:53
Citation
Les Scythes étaient célèbres pour leurs coutumes tribales sanglantes. Les guerriers ne se contentaient pas de couper la tête de leurs ennemis morts mais faisaient des coupes recouvertes de cuir du crâne de leurs ennemis. Ils bordaient d’or ces trophées macabres et les exhibaient fièrement pour impressionner leurs hôtes. Les Grecs antiques prêtaient à la société scythe un caractère matriarcal que démentent toutefois les découvertes archéologiques. Dominée par les hommes, la société scythe était traditionnellement polygame. Un Scythe riche pouvait prendre plusieurs femmes qui pouvaient à sa mort revenir à son fils ou à son frère. Les femmes scythes voyageaient dans des chariots accompagnées de leurs enfants et n’avaient que peu de pouvoir en dehors de leur foyer, à la différence de leurs voisines Sarmates, qui chevauchaient et combattaient à l’égal des hommes. Certains spécialistes suggèrent cependant qu’elles ont pu mener une vie plus active et plus influente à une certaine époque.
Voila ce que j'appelle vivre sainement! Une bonne vie de baroudeur bien comme il faut, avec des femmes, des reussites critiques et du sang...
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 9 Août 2005 à 16:59
on eput rajouter de l'or et des chevaux...    :D
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Amir le 9 Août 2005 à 18:02
Et des têtes coupées, des raids meurtiers et pillages en tout genre.
Ouais, non merci ^^
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 11 Août 2005 à 06:59
Ca vous interesse une petite contribution sur les Ainous? Je regle le probleme de l'hergement des images et je m'y attele.
J'ai aussi envie de vous parlez des iles Kouriles... Peut etre meme que c'est ce que je ferais etant donne que le dossier sur les Ainous est en ligne sur mon site... Ouais, je crois que je vais faire comme ca. Bien sur cela n'entre peut etre pas vraiment dans le cadre de Civilisations au sens  Egyptien, Incas, Grecs, Parisiens... Qu'en pensez-vous? Peut etre cree-je un nouveau topic pour parler des "Terres Inconnues", un sujet qui s'interesserait aux differentes regions du monde au sens geographique et historique plus que civilization ...?

 
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Amnounet le 11 Août 2005 à 07:46
C'est une bonne idée que tu as là tinou et effectivement ça ne serait pas mal de créer un sujet sur les régions du monde d'un point de vue plus culturel et imagé qu'historique .... ;)

Pour l'hébergement gratuit d'images, tu as imageshack(http://imageshack.us) où tu uploades tes images de manière anonyme, image-dream(http://www.image-dream.com) qui fonctionne sur le même principe que imageshack, sauf que tu peux créer un espace membre qui se souvient de tes uploads en vrac, ou encore photobucket(http://www.photobucket.com) sur lequel tu as un vrai espace membre dans lequel tu peux ranger tes images comme tu l'entends dans des dossiers, point faible : il n'y a pas de système d'affichage de miniature, la taille des images est limitée à 250 ko.
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Ness le 11 Août 2005 à 09:09
ton idée est excellente Tinou, ton dossier le bienvenu   :jap:
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 11 Août 2005 à 10:05
Je ne pense pas qu'il faille créer un topic en plus. Il a tout à fait sa place ici.

(le dossier de tinou, il roxe!)

D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Amnounet le 11 Août 2005 à 10:10
Je ne suis pas d'accord avec toi Damien. Je pense qu'un topic sur les cultures locales à travers le monde mérite un topic à part entière .... et je pourrais avoir envie d'y participer ... contrairement à celui-ci qui est très difficile à lire et dont la consistance est bien supérieure à ce que pourrait fournir le commun des mortels ...  :mrgreen:

Edit : De plus ce topic est très axé archéologie et histoire antique ... alors que tinou présenterait un dossier plutôt axé coutumes et traditions ainsi qu'aspects liés à la géographie ... ce qui est fondamentalement différent à mon sens ...  :)
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 11 Août 2005 à 10:14
Sache que le dossier de tinou est trèèèèèès long(4 pleines pages html)... donc ici ou ailleurs, tu auras toujours ce sentiment de difficulté à tout lire...

D's©

Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 11 Août 2005 à 10:17
J'apporte des eclaircissements par rapport a ce que je pensais:

- L'idee que je me fais de civilization est une idee qui est vraiment "human oriented", plus que geographique, qui n'est pas le centre vraiment d'un sujet: l'empire Romain est romain, il s'entendait un peu partout sur le monde mediteraneen, comme les Grecs en leur temps, mais pas seulement. Pareil pour les Egyptiens, les Mayas, les Mongols... Comment vivaient les gens, quelles coutumes, traditions, artisanat sont des questions qui sont mis en avant quand on parle de civilisation, peut etre moins que les specificites geographiques.

- Je proposais de recreer un topic qui aurait vraiment pour centre une region du monde plus que les humains qui y ont habites. Justement pour montrer que si les civilisations naissent et disparaissent, la terre, elle, reste.

Maintenant c'est vrai que c'est du chipotage de camembert ostrogoth que je propose... on pourrait effectivement tout mettre dans un macro topic, au sens elargi.

Mais par exemple si on voulait faire un dossier sur l'Antarctique, ses mythes et legendes, l'histoire de sa decouverte etc. Je trouve que ca colle pas trop a Civilization (a part les Pingoo?!)

Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 11 Août 2005 à 10:18
C'est toi qui voit mon bon, j'espère juste avoir ensuite de quoi le remplir.

D's©
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 11 Août 2005 à 14:00
Les Ainous : voici la premiere partie pour aujourd'hui


Introduction

Avant de rentrer dans le vif du sujet, un petit mot d’explication, car le sujet, vous vous en apercevrez, est relativement large. Le but ici est de donner une introduction très générale sur une des composantes fondamentales de la culture japonaise mais hélas encore beaucoup trop méconnue : la culture des Aïnous. Pour rendre tout cela intéressant, ou tout du moins digeste, nous allons développer plusieurs thématiques différentes, gravitant autour de ce sujet passionnant. Ainsi, nous allons d’abord essayer de présenter quelques notions au niveau des origines des Aïnous, de leur langue et de leur culture. Ensuite viendra une partie dédiée à l’histoire et la situation actuelle de ce peuple, puis la présentation d’un « village » aïnou que votre serviteur a eu la chance de visiter. Enfin un élargissement aux différentes Cultures et Peuplades du Nord dans le monde conclura cet exposé qui je l’espère vous intéressera.

Origines, Culture et Langue des Aïnous

Des origines encore mystérieuses

Commençons de manière classique : qu’est ce qu’un Aïnou ? Et bien c’est un homme, un humain, en langue aïnou. Mais plus généralement, ce nom est celui d’une peuplade qui vivait jadis dans la partie nord du Tôhoku (Nord Est du Japon), sur les îles de Hokkaidô, Sakhaline, les îles Kouriles, jusqu’au Kamtchatka (voir la figure 1). Il s’agit tout simplement de la population autochtone du Japon, à l’instar des Aborigènes en Australie, ou des Indiens d’Amérique.

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous/carte1.JPG)
(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous/carte2.JPG)
Figure 1 – La Mer d’Okhotsk

Outre l’aspect culturel, les Aïnous font partie d’une ethnie différente de celle des Japonais dits « Wajin (和人)», qui s’est répandu dans l’archipel depuis un lieu et une époque encore mal cerné aujourd’hui . Il est difficile de parler d’ethnie et de culture ici tant il est vrai le peuple japonais est varié, malgré les apparences. Les Aïnous ont le teint plus sombre et un système pileux plus fourni que les Wajin. En fait, plusieurs théories ethnologiques s’affrontent, pour déterminer de quelle grande ethnie ou super-ethnie viennent les Aïnous : théories Mongoloïde, Caucasiennes ou Océanienne, les avis sont tous partagés. La linguistique fournit également d’intéressantes théories, en comparant la langue des Aïnous avec le groupe des langues Basques, ou celles des Indiens d’Amérique (Kindaichi), ou bien avec les groupes Indo-europeens (Lindquist et Naert). L’étude de la linguistique aïnou donne des indications très divergentes quand à l’origine de ce peuple : Kindaichi dans les années 50 soutenaient qu’ils venaient du continent américain, via les iles Aléoutiennes et le détroit de Béring, d’autres croient plutôt, en comparant le langage aïnou aux groupes des langues Altaïques (Turque, Arménien, Mongol, langues d’Asie Centrale et Septentrionale..), que les Aïnous auraient plus de familiarités avec la région nord asiatique (Patrie, 1982). Enfin, Vovin (1993), défend l’hypothèse selon laquelle le langage des Aïnous aurait des liens avec les langues d’Asie du sud-est et de l’Océanie. Les Aïnous et les Indonésiens auraient ainsi une origine commune, hypothèse renforcée par les nombreuses similitudes culturelles entre les deux ethnies (vêtements, artisanat...).
Les Aïnous sont un des nombreux peuples dits « du Nord », qui s’étalent depuis la Laponie jusqu’au Nord du Canada, en passant par la Sibérie Orientale. S’étendant depuis la Mer d’Okhotsk sur Sakhaline, Hokkaidô puis le Japon, les Aïnous ont un patrimoine culturel très différent d’une culture dite « asiatique », tout en en faisant quand même partie, de part le fait qu’« ils étaient là avant tout le monde »… A l’heure actuelle, les derniers Aïnous vivent tous sur Hokkaidô, au Nord du Japon.

Petite présentation de la langue aïnou et de sa culture

La langue est un des vecteurs de transmission d’une culture. Les Aïnous n’utilisant pas de système d’écriture, la transmission ne peut se faire qu’oralement. Aujourd’hui, peu de personnes sont capables de parler aïnou, et encore moins de personnes sont capables de l’enseigner. Ceci est bien triste, car toute cette culture, cet héritage est en train de disparaître. Nous allons essayer de vous présenter ici quelques caractéristiques de cette langue, ainsi que quelques notions culturelles inhérentes à la façon de penser des Aïnous.

Où peut-on lire de l’aïnou ?
Pour ceux qui s’intéressent à la géographie du Japon, vous aurez sans doute remarqué une différence assez particulière entre les toponymes des régions de Hokkaidô, et ceux du reste du Japon. Les sonorités de certains noms de lieux sont en effets relativement différentes des sonorités usitées dans le reste du pays. En fait, beaucoup de ces noms de lieux ont une origine aïnou. En poussant nos investigations un peu plus loin, on peut aussi retrouver ces traces d’aïnou dans quelques toponymes du reste du Japon, et notamment du Tôhoku, la région du nord-est du Japon. Mais intéressons nous à Hokkaidô : la carte ci-dessous présente quelques uns de ces noms aïnous.

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous/hokkaido.JPG)
Figure 2–Hokkaidô

Ainsi, nous avons :
Sapporo <sat-poro-pet> : «grande rivière sèche »
Noboribetsu <nupul-pet> : « rivière trouble »
Muroran <mo-rueran> : « pente douce »
Et ainsi de suite…

Il est a noter que cette spécificité n’est pas uniquement japonaise : au Mexique, de nombreux noms d’endroits ont des racines Aztèques par exemple. De Même, aux Etats-Unis d’Amérique, des noms comme « Illinois », « Wyoming », « Chicago » ou « Dakota » sont dérivées de la langue des Indiens d’Amérique qui vivaient dans le secteur.

D’après les deux premiers exemples donnés ci-dessus, nous pouvons déduire aisément que le mot « pet », signifie rivière. Chiri Mashiho, un spécialiste du sujet, explique plus en détail tout cela, tout en insistant bien sur l’importance de la rivière au cœur de la société aïnou, c'est-à-dire du village : dans le sud-ouest de Hokkaidô, « pet » est employé pour dire « rivière », et « nay »(que l’on peut retrouver dans Makomanai par exemple) pour « ruisseau ». Mais dans le nord-est de l’île, on emploie uniquement « nay », et « pet » reste rare. Il est même inutilisé dans les îles Kouriles et Sakhaline. Dans le cadre de l’étude linguistique, Chiri remarque que « nay » pourrait très bien venir du mot coréen « nae », signifiant lui aussi rivière. D’autres coïncidences comme celles-ci sont très intéressantes à relever, et servent beaucoup aux ethnologues et aux archéologues pour comprendre l’origine de cette langue, et à fortiori de ce peuple. Notons aussi une diversité des dialectes et des variations régionales à l’intérieur de cette langue

Au niveau des sonorités : tout comme le coréen, l’aïnou voit souvent ses mots finir par une consonne, ce qui est presque impossible en japonais. Ainsi :

Aïnou : sap : « descendre sur le rivage », sat : « sécher », sak : « perdre, manquer »
Coréen : sap : « pelle, truelle », sat : « natte de paille, tatami », sak : « pincement »
Japonais : sapu : « froid glacial », satsu : « billet », saku : « clôture »

La construction des phrases, d’un point de vue grammaticale, présente d’importantes similitudes avec le japonais et le coréen. Comparez :
« Maman ne revient pas avant minuit » :

Aïnou : totto annoski pakno somo hosipi
Français : mère minuit avant pas revient
Japonais : okaasan wa yonaka made kaeranai
Coréen : onma-neun hanbamjung ggaji an doraonda

Les verbes quant à eux s’accordent en genre et en nombre avec le sujet, comme en français ou en arabe, ce qui n’est pas du tout le cas du japonais ou du coréen. De manière tout à fait générale, nous pouvons voir qu’il existe d’importantes similitudes entre l’aïnou, le japonais et le coréen, mais les linguistes ne s’accordent pas tous pour dire que ces trois langues ont bien une racine commune. Nous l’avons dit au début, beaucoup de linguistes comparent l’aïnou aux dialectes d’Asie du sud-est, et les exemples donnés dans cet exposé ne sont justement qu’un petit aperçu de ce qui peut découler d’études linguistiques de l’aïnou.

Comme nous l’avons dit plus haut, la rivière est au cœur de la communauté des Aïnous ; ils en ont une conception assez unique, et tout est structuré dans la société autour de cette rivière, ou de ce ruisseau. Par exemple, les Aïnous n’emploient pas les points cardinaux, nord, sud, est, ouest, pour s’orienter, mais se réfèrent plutôt à l’amont et l’aval de la rivière, à contre courant ou dans le sens du courant. De même, les rivières naissent dans la mer, et meurent dans la montagne, comme si leur notion de courant était opposée à la notre. Le style de vie des Aïnous est celui de chasseurs pêcheurs cueilleurs, et donc leur vocabulaire s’est organisé en conséquence. Les nombreuses traces et autres sites archéologiques montrent qu’ils vivaient en communauté, non loin du rivage côtier, ou d’une rivière à l’intérieur des terres. Le poisson : la viande de poisson semble également être un des principaux aliments, en témoigne le vocabulaire précis pour décrire chaque espèce de baleines (environ 24), chaque étape du cycle du saumon (20 mots différents), ou bien encore les différents types de phoques (plus de 50 !).

Le mot Kamuy est un des mots-clés de cette culture : il signifie «un » dieu. Les Aïnous sont animistes, et croient donc aux esprits, ou âmes, qui insufflent la vie dans tout ce qui les entoure : animaux, arbres, plantes, et mêmes les objets. Cependant, tout n’est pas aussi simple, et une distinction est faite par exemple entre ce qui est « important » de ce qui ne l’est pas. Qu’entends-on par « important » ? C’est tout simple, sur Hokkaidô et dans toutes les régions où s’étendait jadis le peuple aïnou, l’hiver est extrêmement rigoureux, beaucoup plus difficile à vivre que l’été. On accordait donc une importance toute particulière aux animaux, à la nourriture, aux phénomènes naturels (le feu) qui les aideraient à passer l’hiver. Ainsi, la référence au Kamuy revient souvent lorsqu’on parle de saumon, d’ours, de cerfs ou du feu, beaucoup plus que pour les truites où l’eau, ce qui tombe sous le sens quand on connaît le climat de ces régions !

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous/ours.JPG)
Figure 3 – Un animal respecté

L’ours occupe une place centrale dans la culture aïnou ; en fait le mot Kamuy désigne également l’ours en aïnou. Bien sûr, tout comme les cerfs ou les lièvres, on chassait cet animal très présent dans le secteur (le Kamchatka est à ce titre une des plus grosses réserves d’ours au monde), mais, peut-être à cause de sa stature imposante, l’on réservait un culte bien plus important à l’ours. En fait, on raconte que les ours seraient des dieux des montagnes venus apporter aux hommes de la viande. En mangeant sa chair, les Aïnous libèrent son esprit qui peut ainsi retourner dans le monde des dieux.
Le concept de Kamuy est également appliqué aux hommes, à toutes choses dans le monde, ou plutôt « sur » le monde. Quand au concept de l’âme quittant le corps, il était reconnu par les peuples de Sibérie comme par les premiers japonais. Nous avons par exemple dans l’ancien Japon une distinction entre l’âme iki, souffle de vie, et l’âme tamashii, qui se détache du corps, s’absente de ce dernier, notamment lors des maladies. La vision des Aïnous à ce sujet diffère sensiblement de ses voisins, puisque leur vision de l’âme ne fait pas de distinction entre le principe de vie et la psyché. Selon quelques croyances, l’homme devient Kamuy après la mort, tandis que son âme, Ramat, descend dans un royaume divin, Pokna-Moshir, distinct de celui où se rend l’homme, Kamuy-Moshir. L’âme pourra commencer une nouvelle vie dans ce « monde souterrain ».
Les Aïnous ont une vision dualistique du Monde : il est composé du monde des hommes et de celui des dieux, et une relation de complémentarité existe entre eux, et l’idée qu’ils forment un tout cohérent est essentielle. Les dieux de la Nature prennent la forme d’etres humains dans le Monde Divin (Kamuy-Moshir), et sont déguisés en plantes ou animaux dans le Monde des Hommes (Aïnous-Moshir). A l’opposé, les humains sont des humains dans le Monde des Hommes, mais deviennent des divinités dans le Monde Divin. Les Kamuy sont donc considérés (dans l’idée) « comme » des humains.
Une caractérisation des divinités par genre est également faite. Le Kamuy mâle est considéré comme ayant le pouvoir, la domination, ce qui est représenté par les animaux : ils symbolisent la chasse, et le rôle de l’homme (mâle) dans l’écologie (au sens grec du terme) aïnou. D’autre part, la productivité et la nutrition sont symbolisées par des Kamuy femelles, et exprimés à travers les plantes, qui sont liées à la cueillette, rôle de la femme (femelle) toujours dans l’écologie aïnou. De ce contraste entre divinités mâles et femelles découle celui existant entre l’extérieur (politique et social) et l’intérieur (domestique), ou bien le contraste existant entre prêtres (hommes uniquement) et shamans (médecine, prédictions au contact du surnaturel…) dans les activités religieuses. Mais si la domination est symbolisée par une divinité mâle, le rôle de médiateur entre le Monde des Hommes et le Monde Divin est lui symbolisé par le genre femelle d’une divinité. Les rituels religieux où les femmes ne sont pas supposées participer ne peuvent se faire correctement sans l’appel à la Divinité du Feu, une déesse. De même, les Aïnous doivent prier la Déesse de la Chasse et de la Pêche pour espérer ramener de quoi se nourrir. Ce rôle des déesses médiatrices montre que les échanges entre Monde Humain et Monde Divin ne peut se faire sans l’aide du genre féminin. Ces divinités femelles symbolisent la nécessité d’une coopération totale et du support des femmes pour maintenir la société. Au regard de tout ceci, on peut dire que la vision du genre chez les Aïnous est assez égalitaire, en tout cas basée sur la relation de complémentarité qui existe entre les deux sexes, plus que sur l’inégalité

La cosmologie, la spiritualité des Aïnous sont relativement complexes, et pour plus de détails, je vous renvoie à l’excellent « The World View of the Ainu », de Yamada Takako (voir bibliographie).

Voici pour finir cette partie un petit précis de vocabulaire (phonétique) aïnou, qui sait, si un jour vous venez sur Hokkaidô faire des randonnées dans la forêt, au détour d’un taillis, vous aurez peut être besoin de crier à l’aide…

Français -> Aïnou
Montagne -> Noupouli
Riviere -> Pet/Nay
Eau -> Wakka
Feu -> Apé
Route -> Lou
Grand -> Polo
Petit -> Polo
Village -> Kotan
Homme -> Hékachi
femme -> Makkachi
neige -> Upat
Maman -> Hapo
Papa -> Michi
Tête -> Sapa
Forêt -> Shikou
Main -> Tek
Bonjour -> Ilankala(p)té
Merci -> Iyailaikéshi
Aujourd’hui -> Tanto
Hier -> Nouman
Demain -> Nisatta



Voila donc une petite présentation de la culture et de la langue des Aïnous. Comme vous avez pu vous en rendre compte, le sujet est très vaste, et si il a pu susciter chez vous un intérêt quelconque, si votre curiosité a été titillée, nous ne saurions trop vous conseiller de prolonger et d’approfondir ce qui a été effleuré ici en vous aidant par exemple de la bibliographie donnée plus bas. Nous vous invitons maintenant à passer à la suite de l’exposé consacrée à l’histoire du peuple aïnou.

Sources :

Internet :
http://linguistics.byu.edu/classes/ling450ch/reports/ainu.html : une synthèse des études linguistiques visant à déterminer l’origine de la langue aïnou.

Bibliographie :

 Yamada Takako : The World View of the Ainu,2001, Kegan Paul.
 Chiri Mashiho : Chimei Ainugo Shojiten, 1956, Hokkaidô Shuppan Kikaku Center.
 Shibatani Masayoshi : The languages of Japan, 1990, Cambridge University Press.
 Hattori Shiro : An Ainu Dialect Dictionary, 1964, Iwamami Shoten.
 James Patrie : The Genetic Relationship of the Ainu Language, 1982, University press of Hawaii.



J’adresse mes sincères remerciements à Katsunobu Izutsu (Faculté d’Education de l’Université de Hokkaidô) pour toutes ses explications, ainsi qu’à ToMach pour son aide et les lectures qu’il m’a conseillées.

Figure 1: © http://www.expedia.com/pub/agent.dll
Figure 2 : © http://www.members.aol.com/%20jinngroup/
Figure 3 : © tinou


Maintenant que nous sommes tous bilingues aïnou, intéressons-nous à l’histoire, le passé, le présent et l’avenir des Aïnous.
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 17 Août 2005 à 16:06
On va continuer dans la joie et la bonne humeur:

L’Histoire des Aïnous 


L’histoire du peuple aïnou n’est pas encore bien connue : beaucoup de pistes sont encore à explorer, de matériaux à étudier et à resituer dans une perspective historique, que ce soit au niveau de l’ethnologie, de l’archéologie ou de l’anthropologie. Nous l’avons déjà dit plus haut, le rôle des Aïnous dans l’histoire du Japon est encore flou, et il en va de même pour les origines du peuple japonais lui-même. Dans cette partie, nous allons essayer de restituer ce qui semble être à peu près sûr aujourd’hui : les faits historiques, mais aussi les réflexions, les analyses qui ont découlées de ces recherches. En remontant vers le présent, nous essaierons par la suite de présenter la vie des Aïnous aujourd’hui, au Japon. ?


Premières traces des Aïnous dans l’Histoire

Il faut remonter au début du 8ème siècle de notre ère et l’écriture du Kojiki, l’encyclopédie de tous les mythes et légendes racontant l’origine du Japon, et plus simplement le premier ouvrage de littérature japonaise, pour entendre parler des Aïnous, lesquels sont parfois considérés comme les descendants des Emishis. Si l’on creuse un peu plus, on s’aperçoit que plusieurs théories sont en présences quand à cette descendance. Les Emishis sont un peuple qui vivait dans le nord du Tôhoku et le sud-ouest de Hokkaidô. En fait plusieurs tribus, peuples et cultures différentes semblaient cohabiter à l’époque dans la région : Emishi (nord de Honshu, sud de Hokkaidô), Ashihase (nord de Hokkaidô) etc. Les Emishis ont sans doute été les premiers, de par leur position géographique, à avoir eu des contacts avec le Japon des Wajin, celui de l’Empereur etc. Repoussés, ils ont du s’étendre sur Hokkaidô où ils ont dû entrer en contact avec les autres cultures déjà sur place, comme les Ashihase, qui “seraient” eux descendus depuis Sakhaline, et devenir les Aïnous que nous “connaissons” (culture Satsumon)… D’autres traces suggéreraient que les quelques Emishis restés sur Honshu, auraient été absorbé culturellement par le Japon de l’époque Yayoi (plus spécifiquement entre les 5ème et 7ème siècle)…
D’autres hypothèses sont également envisagées, mais ce qu’il faut surtout retenir à ce stade (et dans l’optique du texte) concerne plus la pluralité des peuples et des cultures qui cohabitaient dans les régions du Tôhoku, de Hokkaidô, de Sakhaline et plus généralement de toute cette portion d’Asie du nord-est.
A partir du 8ème siècle, nous pouvons considérer que le peuple aïnou se répartissait de la façon explicitée sur le schéma 1. Une distinction est faite entre les Aïnous des îles Kouriles (Chishima), ceux de Hokkaidô, alors appelé Ezochi ou Ezogashima (terre des Aïnous), et ceux de Sakhaline (Kita Ezochi).

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous2/schema1.JPG)
Schéma 1 - Aïnoumoshir, le monde des Aïnous

Au 12ème siècle de notre ère, par des contacts avec d’autres régions, comme la région de la rivière Amur, ou?bien évidemment le Japon, le métal est introduit et rend possible tout ce que la céramique de la culture Satsumon ne permettait pas : haches, armes, bijoux, outils en bois etc. Ces nouveautés entraînent une expansion économique et militaire ainsi qu’une intensification des échanges entre les trois principales régions alors habitées par les Aïnous. Au 13ème siècle, les Aïnous de Kita Ezochi se confrontent aux Nivkh, venus depuis la côte toute proche. Les Yuan venus aider les Nivkh entreront également en contact avec les Aïnous. De manière générale, les Aïnous de Kita Ezochi avait un mode de vie assez différent des Aïnous de Hokkaido : influencé par les cultures dominantes de la Mandchourie, du bassin de la rivière Amur, et par les Russes. Leur subsistance se rapprochait plus de celle des peuples de Sibérie, vivant des ressources des forêts boréales. Quant aux Aïnous des îles Kouriles, le manque de bois de leur milieu (notamment les îles du nord) les obligeait à échanger des ressources comme des peaux de phoques, des plumes de faucon ou d’autres produits maritimes contre des ressources logistiques venant de Ezochi et de Kita Ezochi.

Au 15ième siècle, les Wajin (nom donné aux Japonais non autochtones) établissent une petite base économique dans le sud-ouest de Ezochi : c’est à partir de là que les premiers vrais échanges entre Aïnous et Wajin ont lieu, échanges qui vont se transformer en conflits puisque les Wajin ne sont pas là que pour les richesses de la terre d’Ezochi, mais bien pour Ezochi elle-même.


Les Aïnous et le Japon de l’après-Sekigahara

1604 : le vainqueur de la bataille de Sekigahara, le Shogun Tokugawa Ieyasu, donne au clan Matsumae le monopôle du commerce avec les Aïnous de l’île d’Ezochi. S’ensuit une période d’accélération des échanges, mais aussi d’échauffements entre les deux peuples. Les Aïnous ne sont pas non plus d’accord entre eux, et des batailles ont lieux entre les clans Shibechari et Hae (1648). En 1669, Shakushain, leader des Shibechari, mènent tous les Aïnous de Ezochi contre les Wajin dans ce qui restera le plus effroyable conflit entre les deux peuples. Lors des négociations pour la paix, le clan Matsumae empoisonne Shakushain, ce qui met finalement un terme a la guerre. Les Wajin ont ainsi gagné une énorme mainmise sur les richesses des Aïnous.
1789: les Aïnous de Kunashiri Menashi (Iles Kouriles) se rebellent contre des marchands japonais qui les forçaient à travailler dans un port de pêche dans des conditions inacceptables. 37 chefs Aïnous sont exécutés par les soldats du clan Matsumae, qui vont par la suite contraindre par la force les Aïnous a céder leur terres au Japon. Le Shogounat des Tokugawa va par la suite (fin du 18ème siècle) prendre le contrôle de Ezochi, transférant les Matsumae dans le Tôhoku, avant de la leur rendre en 1821. Les Russes ont commencés à se montrer en effet très intéressés par les contrées reculées de leur empire, qui n’avait alors jusque là pas de frontières bien précises, et avaient commencé à envahir dès 1730 le nord des îles Kouriles et de Sakhaline (Kita Ezochi).

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous2/fig1.JPG) 
Figure 1 - Les Russes approchant les îles Kouriles (auteur et date inconnue)

Cette rapide prise en main du Shogun va se traduire par le début d’une violente politique assimilationniste des Aïnous au peuple japonais, et ce dans le but de démontrer aux Russes qu’Ezochi est bien japonaise.

Le dessin de la frontière sera chose faite en 1854, avec le traité de Shimoda, qui prévoit de partager le Japon et la Russie entre les îles d’Urup et d’Etorofu. Pour garder les îles Kouriles, le gouvernement Japonais a pour la première fois prétextée que les Aïnous qui vivaient là étaient des Japonais, et que donc ces terres étaient japonaises. Quand à l’île de Sakhaline, alors appelée Kita Ezochi, elle sera désignée comme un territoire commun où Japonais et Russes pourront vivre ensemble.
Voir le schéma 2 :

 (http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous2/schema2.JPG)
Schéma 2 - Les nouvelles frontières du Japon (1)

Sitôt le traité signé, le Japon a accéléré la japonisation du nord du pays. Ceci s’est traduit par des politiques d’éducation de la population aïnou à la langue et à la culture japonaise, ainsi que par le contrôle direct du gouvernement sur les terres des Aïnous. En 1869, Kita Ezochi est rebaptisée Karafuto, et Ezochi devient Hokkaidô. La Commission de Colonisation est établie et les japonais vont commencer à s’installer massivement sur l’île, si bien que les Aïnous deviendront rapidement minoritaires, renforçant du même coup l’assimilation forcée. De nombreuses traditions et coutumes aïnous sont interdites : le tatouage des femmes, les boucles d’oreilles des hommes, l’incinération de la maison et le déménagement de la famille à la mort d’un de ses membres…

Les Aïnous pendant l’ère Meiji

En 1875, un nouveau traité avec la Russie prévoit le rattachement de toutes les îles Kouriles au Japon, en échange de Karafuto, devenant Sakhaline (voir le schéma 2). Les Aïnous de Sakhaline sont, pour la plupart, expatriés sur Hokkaidô. On pense que des maladies telles la vérole, ont fait beaucoup de dégâts sur Sakhaline, et donc à la population aïnou de cette île. Les populations aïnous de Hokkaidô sont relogées dans des réserves ; on envoie les enfants dans des écoles différentes des écoles traditionnelles japonaises, et ce, afin de mieux contrôler le peuple aïnou. On interdit aux Aïnous de parler leur langue, et les pratiques traditionnelles ont donc disparues peu à peu, car l’héritage aïnou se transmet uniquement par voie orale (pas de système d’écriture), via des chants, des récits et des poèmes…
Cependant, en 1878, la Commission de Colonisation commence à employer le terme “anciens aborigènes” pour désigner les Aïnous. Plus tard, dans les années 1890, des tentatives pour faire passer une loi de protection des aborigènes de Hokkaidô au gouvernement échouent, puis réussissent en 1899, avec un pacte visant à apporter l’aide nécessaire au développement des gens les plus pauvres de Hokkaidô, et qui se trouvent être en majorité des Aïnous, en s’axant notamment sur l’agriculture. Mais les terres attribuées aux Aïnous se révèleront incultivables, les meilleures étant réservées ou déjà occupées par les Japonais. Ne pouvant plus chasser, ni pêcher par décret gouvernemental, les Aïnous se retrouvent sans ressources, ruinés. Ce pacte de 1899 est vu comme le coup de grâce porté aux autochtones du nord du Japon.
Assimilés par la force (et par la loi) à la population japonaise, beaucoup d’Aïnous se résignent, et s’intègrent dans la société japonaise, meurent même sous le drapeau japonais ; les multiples révisions (1919, 1937, 1946) du pacte de 1899 n’aident finalement pas beaucoup les premiers habitants de Hokkaidô à relever la tête, le mal était déjà fait.

Le réveil, au lendemain de la 2nde Guerre Mondiale

Les choses changent au lendemain de la seconde guerre mondiale : d’une part les frontières du pays (voir le schéma 3), et d’autre part, le système politique du pays, qui bascule, sous le contrôle américain, dans la démocratie.


 (http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous2/schema3.JPG)
Schéma 3 - Les nouvelles frontières du Japon (2)

Les îles Kouriles sont depuis 1945 et jusqu’à aujourd’hui toutes aux mains de la Russie, qui en a fait un rempart militaire stratégique contre les Américains pendant la Guerre Froide. Les Japonais revendiquent depuis cette date la possession de Etorofu, Shikotan, Kounashiri et les îlots Habomai, où des Aïnous, puis des Japonais ont vécus.

1946 : la démocratisation du pays et l’article 13 de la Constitution rendent illégales la discrimination et l’assimilation du peuple aïnou. Les Aïnous obtiennent les mêmes droits que les Japonais. Une prise de conscience de l’identité aïnou s’opère, et la même année, l’Association des Aïnous de Hokkaidô voit le jour (Hokkaidô Ainou Kyôka), rebaptisée Association Utari de Hokkaidô en 1960. Les Aïnous vont pouvoir maintenant faire pression sur le gouvernement pour faire revivre leur culture.

Le Japon signe en 1979 le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques (ICCPR). Ce pacte prévoit que « s’il existe dans les pays signataires des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques, les personnes appartenant a ces minorités ne peuvent être privé du droit d’avoir en commun avec les autres membres de leur groupe leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion, ou d’employer leur propre langue (Troisième partie - Article 27) ». En ratifiant ce pacte, le Japon a cependant déclaré qu’il n’existait pas de telles minorités dans le pays. Le pacte de 1899 prônant l’assimilation, bien qu’obsolète et illégitime, avait la vie dure.

En 1986, le Premier Ministre japonais Nakasone déclare que le Japon est une nation mono ethnique, ce qui provoque de vives critiques au sein de la communauté et des associations aïnous. L’année d’après voit la première participation des Aïnous à la Conférences des Nations Unies sur les Peuples Autochtones, ce qui les place pour la première fois sur la scène internationale. 2 ans plus tard, en 1989, le gouvernement japonais établit un comité qui devra examiner les différents points d’une future Loi Concernant le Peuple Aïnou.

Les choses vont s’accélérer en 1997. L’affaire du barrage Nibutani va opposer deux Aïnous à la construction d’un barrage sur un site sacré aïnou (la région de la rivière Saru). La Cour de Sapporo reconnaissant le caractère sacré du lieu insiste également sur le fait que malgré la signature de l’ICCPR en 1979, le gouvernement japonais n’avait pas encore véritablement cherché à protéger l’héritage culturel des Aïnous. S’ensuit donc le vote de la loi de 1997 dite “Nouvelle Loi Aïnou”, qui reconnaît pour la première fois l’existence d’une minorité ethnique au Japon, et prévoit notamment l’établissement d'un centre de recherche pour la culture aïnou, de mettre en place des infrastructures permettant d’étudier la langue des Aïnous, et enfin d’encourager la préservation des traditions et coutumes aïnous.

Les Aïnous aujourd’hui

Les Aïnous ne sont aujourd’hui plus que 24000 sur tout Hokkaidô, vivant principalement dans les sous-préfectures de Iburi et de Hidaka. Notez que ce chiffre est loin d’être précis, car beaucoup d’Aïnous sont maintenant complètement assimilés à la population japonaise, ne voulant plus revendiquer leur patrimoine, ou même ignorant complètement leurs origines aïnou. En effet, bien qu’illégale, la discrimination existe toujours au Japon. D’après des enquêtes de l’association Utari, les Aïnous souffrent de discrimination essentiellement à l’école, au regard du mariage, et au travail. Si les jeunes Aïnous ou ayant un patrimoine aïnou réussissent presque aussi bien que les japonais les concours d’entrée au lycée, ils sont en revanche moitié moins nombreux à entrer à l’université. Même si le niveau de vie de la population aïnou s’est un petit peu relevé, il y a encore du chemin à faire pour rattraper celui de la moyenne générale des habitants de Hokkaidô ; les Aïnous restent beaucoup plus dépendant des aides sociales que la majorité des gens.

Les associations se battent pour que cela cesse, et surtout pour faire en sorte que le gouvernement reconnaisse le caractère «autochtone » du peuple aïnou. Par cette revendication, les Aïnous espèrent obtenir des droits spécifiques, comme celui d’avoir un endroit pour développer la culture et faire revivre la tradition aïnou. Il ne s’agit pas de faire une réserve comme c’est le cas aux Etats-Unis, mais plutôt un endroit distinct d’un parc d’attraction, où l’on ferait vivre et poursuivre la vie selon la tradition aïnou et donc basé sur la préservation de l’environnement. Ce projet a un nom : IWOR. Prévu par la Nouvelle Loi Aïnou de 1997, ce parc ne s’est pas encore construit pour des raisons de restrictions budgétaires liées au contexte économique international. Mais les Aïnous, depuis leur participation à la Conférences des Nations Unies sur les Peuples Autochtones, ont appris des autres minorités de ce monde : des échanges ont eu lieu avec les Inuits du Canada par exemple. Petit à petit, en se servant du pouvoir des médias et en apparaissant sur la scène internationale, les Aïnous ont pu faire bouger un gouvernement souvent jugé trop immobiliste, et peuvent encore influer de la sorte.

Réalistes, les Aïnous écartent toute idée de revendication territoriales : l’histoire a fait son oeuvre, et les Wajin sont maintenant bien implantés sur Hokkaidô. Il n’est de toute façon pas question de séparation violente, de refoulement, ni même de guerre ouverte, la tradition aïnou favorisant plutôt le dialogue. L’essentiel reste quand même de faire admettre au gens que l’idée d’un peuple japonais mono ethnique, mono culturel est erronée (elle est même illégale depuis 1997). Agir en conséquence au coeur de la société, par exemple en revenant sur les manuels scolaires, qui parle des Aïnous, mais les considère comme complètement assimilés à la population, peut favoriser une prise de conscience, en tout cas le débat d’idée. Notons qu’il en va exactement de même pour le peuple d’Okinawa, qui sont eux plus d’un million à s’identifier comme descendants du peuple des Ryûkyû, et qui ont des représentants spéciaux au sein de la Diète.
Les associations Aïnous sont nombreuses à l’heure actuelle sur Hokkaido. Des débats ont lieu entre elles, revenants sur les lois, faisant du lobbying auprès des gens. Beaucoup d’opinions sont exprimées, par exemple concernant la loi de 1997 : certains y voient un progrès immense, d’autres pensent que cela ne va pas assez loin. Il en va de même pour les musées ou les villages reconstitués : cela aide à montrer en priorité aux japonais qu’ils existent, mais on peut voir ça aussi comme la disneylandisation d’un peuple, d’une culture. Le projet de parc IWOR est attendu au tournant à ce sujet.

Conclusion

Voilà donc en condensé les faits marquants de l’histoire des Aïnous. Pour plus de précisions, nous vous renvoyons aux sources bibliographiques à partir desquelles a été rédigé ce texte. Nous avons pu voir que les Aïnous, regroupés en association, ont entrepris un important travail de fond pour faire revivre leur culture. Nous l’avons dit plus haut : les origines de ce peuple sont mal connues, et les recherches en ce sens peuvent avoir une influence capitale sur l’opinion : en 1997, trois intellectuels japonais, l'ethnologue Nakazawa Shin'ichi, l'historien Umehara Takeshi et le philosophe Yoshimoto Takaaki, ont affirmé que les Aïnous : “ sont des proto-nippons, (...). Avec les habitants d'Okinawa, ils [sont] les ultimes représentants des Japonais d'avant le Japon”. Nul doute que ce genre d’affirmation n’aide en rien à la revendication par les Aïnous (comme) d’un statut de peuple autochtone, bien distincts des colons Wajin. Nul doute aussi que les Aïnous doivent prendre un chemin parfois différent du recours systématique a la loi (le cas du barrage de Nibutani reste exceptionnel) dont usent beaucoup les minorités autochtones du continent américain par exemple. En effet, dans un pays comme le Japon, recourir à la justice n’est pas vraiment encouragé, voire mal vu : les arrangements à l’amiable sont préférables, pour éviter de briser l’harmonie, et de perdre la face en société. Mais il faut aussi tenir comte des mutations et des changements qui s’opèrent constamment au sein de cette société japonaise, qui iront sans doute dans le sens de la lutte des Aïnous.

Sources :

Internet :

http://www.monde-diplomatique.fr/ : un intéressant article sur les conflits territoriaux entre le Japon et la Russie.
http://www.isn.ne.jp/~suzutayu/MHJapan/WhosEmishi.html : un exposé sur les Emishis.
http://doc-iep.univ-lyon2.fr/Ressources/Documents/Etudiants/Memoires/MFE2002/chesneaue/these_body.html : une étude incontournable sur les Aïnous et leur combat en tant que peuple autochtone.
http://www.admin.ch/ch/f/rs/0_103_1/ : pour tout savoir sur le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques (ICCPR).
http://www.ainu-assn.or.jp : le site de l’Association des Aïnous de Hokkaido.
http://members.jcom.home.ne.jp/yosha/minorities/nationalityinjapan.html : une histoire de la nationalité japonaise.
http://www.artsci.wustl.edu/~copeland/ainu.html : les Aïnous et le racisme au Japon.


Bibliographie :

- William W.Fitzhugh et Chisato O.Dubreuil : Ainu : Spirit of a Northern People, 1999, University of Washington Press.
- Fred Peng et Peter Geiser : The Ainu, The Past in the Present, 1997, Bunka Hyoron Publishing Company.
- Hokkaidô Ainu Kyôkai, Brochure on the Ainu People, 2003.

Je tiens à adresser mes vifs remerciements au personnel de l’Association des Aïnous de Hokkaido pour leur aide précieuse et le temps qu’ils m’ont accordé, ainsi qu’à ToMach, pour les précisions et les conseils qu’il m’a donné.

Schéma 1 : © Hokkaido Ainu Kyôkai , Brochure on the Ainu People, 2003
Schéma 2 et 3: © http://www.monde-diplomatique.fr/cartes/kouriles
Figure 1 : © William W.Fitzhugh et Chisato O.Dubreuil : Ainu : Spirit of a Northern People, 1999, University of Washington Press.
Exposé rédigé par Jolan, Juin 2004
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Khiryu le 17 Août 2005 à 22:38
Je n'ai pas eu le temps de tout lire mais belle documentation, bravo.
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 22 Août 2005 à 13:58
La suite : du concret cette fois, pour nous reveiller des discussions parfois bien futiles de ces dernieres heures

Reportage : Visite d’un village aïnou : Porotokotan.


Comme la partie précédente à essayer de le montrer, les Aïnous et leur culture sont en voie de disparition depuis trop longtemps. Le gouvernement japonais, depuis notamment les lois de 1984 et de 1997, a versé des fonds pour promouvoir cette culture, et un des résultats de cette action, nous pouvons le voir notamment à travers ce village de Porotokan, et de son musée, renommé comme le plus intéressant du pays sur la question. A quoi cela ressemble t-il concrètement ?

Localisation : Shiraoi, Hokkaidô (voir carte).
Site Web : http://www.ainu-museum.or.jp

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous3/fig1.JPG)
Figure 1 - Shiraoi sur la carte

Ce petit groupe de maisons qui fut apparemment un des plus grands village aïnous de Hokkaidô, est construit au bord d’un lac, le tout à quelques encâblures de la côte (2 kilomètres environ), ce qui n’est guère étonnant lorsqu’on sait à quel point la rivière, et plus généralement les ressources produites par l’élément aqueux sont importantes pour les Aïnous. Porotokotan est en fait assez petit finalement, une dizaine d’habitations traditionnelles, un musée et quelques attractions annexes comme un petit espace zoologique présentant des chiens originaires de la région, ou les fameux ours, animaux-divinités fétiches des Aïnous.

 (http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous3/photo1.JPG)
Photo 1 - L’entrée du village

L’atmosphère qui règne dans le village est assez étrange, nous sommes en fin de matinée, le temps est éblouissant, mais tout est étrangement calme. Les haut-parleurs émettent un son assez particulier, tribal, comme j’allais m’en rendre compte par la suite. Le vent glacial balaie la grande allée principale, pressant les quelques personnes au dehors à l’intérieur des bâtisses. Je commence ma visite par le musée.


Première impression : il est grand ce musée, en particulier si l’on compare avec tout ce que l’on peut voir à Sapporo sur le sujet par exemple. La visite commence par de grands panneaux présentant le mode de vie des Aïnous, la pêche, la chasse, la vie de tous les jours au village. Mais la chose qui attire vraiment mon attention, ce sont plutôt tous les objets, réels, exposés au public : bijoux, vêtements traditionnels, arcs, instruments de musiques… C’est très surprenant car cela “choque ” culturellement avec ce que l’on est en droit de s’attendre dans un pays comme le Japon. Cette découverte du concret est vraiment une expérience intéressante : on apprend par exemple qu’une coutume voulait que les femmes portent une “ moustache ”, plutôt ocre (genre ériné), peinte au dessus des lèvres.

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Photo 2 - Bijoux aïnous

Sont également présentés divers outils utiles à l’agriculture, à la pêche, à l’artisanat etc. On apprend par exemple que pour pêcher le saumon, on pouvait disposer une petite installation de bois jouant le rôle d’“ enclos ” dans la rivière remontée par le poisson. Il ne reste alors plus qu’à “ récolter ” les prises. Il arrivait aussi parfois que les aigles se servent allègrement dans ce garde-manger ! En mer, on pêchait par exemple les espadons à l’aide de grandes lances munies d’une imposante pièce métallique en forme d’hameçon au bout.

 

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Photos 3 et 4 - Outils de chasse, armes

Tout au long de la visite sont exposés de gigantesques dioramas grandeur natures reconstituant des scènes clés de la vie chez les Aïnous. Tout ceci est extrêmement bien fait, avec par exemple des petits artifices, animations, jeux de lumières pour présenter les scènes de vie du village, entre le lac et la profonde forêt… On s’y croirait vraiment, et nul doute que l’on prend conscience de la spécificité de cette culture, ou tout du moins celle d’un endroit comme Hokkaidô à travers ces scénettes. Les photos rendent évidemment moins qu’en vrai, mais voici quand même un petit aperçu :


(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous3/photo5.JPG)
Photo 5 - Chasse à l’ours

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous3/photo6.JPG)
Photo 6 - La vie au village

Une autre chose qui marque dans cet endroit, c’est le nombre de types de vêtements différents  présentés. Les Aïnous portent des sortes de kimonos faits à partir de peaux d’animaux (ce qui se voit beaucoup plus par exemple dans le cas des Aïnous de Sakhaline), ou de tissus qu’ils fabriquaient eux-mêmes (ou qu’ils ont plus tard “ importé ” des japonais), avec des manches sans doutes moins larges que son homologue japonais, le tout étant plus près du corps, vraisemblablement pour des raisons climatiques. Sur le dos sont représentés des dessins et figures géométriques variées et vraiment jolies. Le genre de motifs que l’on retrouve parfois dans d’autres cultures comme celles des Indiens d’Amérique ou même en Polynésie… Les pieds sont quant à eux protégés par des sortes d’espadrilles en fibres végétales assez épaisses… Ça doit faire un bruit sympa quand on marche dans la neige avec !

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Photo 7 - Des habits aux motifs géométriques

Evidemment, tout un tas d’explications sont disponibles à l’accueil, et il ne faut vraiment pas hésiter à demander à ce niveau là, tout le monde est très gentil et compréhensif. On apprend ainsi que quelques objets exposés ne proviennent pas du folklore aïnou, mais ont été fabriqué par des Nivkh, une peuplade du nord-est de la Mandchourie (bassin de la rivière Amur) et qui avait eu des contacts avec les Aïnous (cf. partie précédente). Il y a aussi toute une librairie avec des livres sur le sujet, malheureusement tous en japonais, sauf un livre en anglais, mais plutôt destiné aux enfants. Dommage.

Au sortir du musée, je vais jeter un œil aux ours en cages, qui sont quand même rudement impressionnants au niveau carrure. Les voir en cage peut laisser perplexe : en restant très terre-à-terre, on pourrait voir ça comme un “ dieu emprisonné ”. Les Aïnous, tout comme beaucoup de gens je pense, préfèreraient sans doute les savoir en liberté plutôt qu’ici. Enfin, ma réflexion s’interrompt quand le haut-parleur annonce qu’une discussion avec des Aïnous va commencer sous peu dans une des huttes du village. Voilà qui promet !

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Photo 8 - Le village

Je me dirige donc vers une de ces maisons traditionnelles. Il fait frais et bon à l’intérieur (il fait quand même plus chaud que dehors) ; l’endroit est large et composé d’une grande pièce principale. Au milieu de la pièce, une petite estrade, avec en son centre un foyer : une petite flambée réchauffe les lieux. Une personne vêtue avec le même genre de vêtements que l’on peut voir dans le musée accueille tout le monde, et les fait asseoir sur des bancs disposés devant l’estrade. Je m’assois à mon tour et lève les yeux au plafond : il est très haut, et des dizaines de poissons sont suspendus, en train de sécher, au dessus de nous. L’homme en habit traditionnel est donc un Aïnou, et il est censé nous raconter l’histoire de ce village, et à fortiori, du peuple aïnou. Le tout est évidemment très vulgarisé, et “ caressé dans le sens du poil ”, entendez par là que les japonais ne seront pas choqués…


On nous explique quelque choses que je m’étais gardé de vous dire jusque là : la construction des maisons. En fait, les maisons de Porotokotan sont plus grandes qu’à l’accoutumée et ce, pour pouvoir recevoir le plus de gens possibles. Rien ou presque n’est laissé au hasard quand on construit une maison chez les Aïnous. Les fenêtres sont ainsi toujours localisées au même endroit, presque toujours au nombre de trois : deux dans la direction est, et une dans la direction du sud, qui a une connotation divine. L’entrée étant toujours située à l’ouest. Jamais donc de fenêtres au nord. Regarder dans la maison par la fenêtre sud est un tabou : seuls les mauvais esprits le font. Notez que les Japonais ont aussi des “ tabous directionnels ” : la direction nord-est est par exemple source de mauvaise chance, on évite de construire des maisons dont l’entrée se situe face à cette direction. La construction de la maison est simple : on construit une charpente en bois en attachant des poteaux de bois par brelage. Ensuite on recouvre le tout par d’épaisses nattes constituées de branches et de fourrages. Je n’ai pas vu de maisons faites en chaume.

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Schema 1 - Plan d'une maison aïnou

Les explications de notre hôte sont très intéressantes ; il n’hésite pas à revenir sur l’actualité des Aïnous, de leur lutte pour la préservation de leur culture. Le public pose d’ailleurs des questions pleines de bon sens, il y a une bonne interaction je trouve. Il nous raconte aussi une légende sur l’Ours, puis nous parle du rôle de la musique chez eux. Nous allons avoir droit à une petite démonstration : des femmes elles aussi vêtues en habit traditionnel rejoignent le centre de la pièce. Elles se présentent, nous disent qu’elles sont elles aussi des Aïnous, et nous montrent un instrument : une espèce de guimbarde assez grande. Accompagné au chant par son amie, la première femme nous fait montre de son talent. C’est vraiment très particulier comme son, à la frontière du didjéridoo des aborigènes d’Australie, et de la guimbarde, donc. S’ensuit des chants, des percussions, à chaque fois données par de nouvelles personnes arrivant au fur et à mesure. Une danse traditionnelle autour du feu vient conclure cette rencontre. Je vous renvoie aux photos, même si évidemment, sans le son, cela ne vous donne qu’une petite approche de l’ambiance réelle.

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photo 9 - Une envoutante mélodie…

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photo 10 - Danse avec les saumons


Une impression douce amère me traverse à la sortie de tout ça. Je suis content, car après tout, j’ai appris une foultitude de chose et enfin pu voir quelque chose de concret sur le sujet, même si évidemment, ce site est un site touristique avant tout. L’entrée du village (et donc la sortie) se fait ainsi par un immense corridor de magasins touristiques vendant tout et n’importe quoi aux touristes. Cet endroit ressemble quand même plus à un Disney-Aïnou qu’autre chose, les japonais eux-mêmes le reconnaissent. La possibilité de rencontrer des Aïnous, de parler avec eux (ce fut vraiment le cas, en raison peut-être du nombre réduit de visiteurs) est vraiment une perspective intéressante. Mais quand on lit le prospectus descriptif du musée, on préfère se référer “ au temps qui passe ” plutôt qu’à la violente politique assimilationniste japonaise à l’origine de la disparition de ce peuple. Ce village a bien pour but de présenter ce qu’est le folklore aïnou, et non d’expliquer l’histoire. Le musée est vraiment excellent, et vaut à lui seul le détour. Le site est touristique, certes, mais pas tellement non plus : j’y suis allé un jour de très beau temps au début de la Golden Week, et pourtant, il y avait peu de monde. Avant d’entrer dans ce village, on peut faire une petite promenade d’une heure et demie au tour du lac qui borde le village. Cela m’a personnellement aidé à me mettre dans l’ambiance, réalisé que j’avais quitté la ville, que les grands espaces de Hokkaidô sont là. Le vent balayant l’horizon, la lumière irréelle, les montagnes enneigées au loin, le silence, enfin, même au milieu du parc… Le cadre de vie des Aïnous n’a pas vraiment disparu, lui.


http://www.ainu-museum.or.jp : le site du musée aïnou de Shiraoi
Toutes les photos sont ©copyright jolan

Exposé rédigé par Jolan, Juin 2004
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 23 Août 2005 à 15:47
Et bien... on peut pas dire que cela vous ai enthousiasme!

Bon je finis :

Conclusion - Les Aïnous et les Peuples du Nord


Le but de cette dernière partie est de resituer l’histoire, le peuple, la culture des Aïnous dans un contexte plus large que celui du Japon. Sortir des frontières est une des premières choses que l’on fait quand on s’intéresse à ce pays. On s’intéresse à la Chine, à la Corée bien sûr, mais on a parfois tendance à oublier la réalité de la région : le Japon est un long pays, plus de 3000 kilomètres du Nord au Sud, et la culture, le mode de vie des gens subit autant de variation que l’on parcoure de latitudes. Les parties précédentes se sont focalisées sur les Aïnous en tant que peuple du Japon, celle-ci va essayer de s’intéresser aux Aïnous en tant que peuple du Nord.


L’appellation « Peuple du Nord » n’est pas un nom standard, mais il revient assez souvent lors de l’étude des Aïnous. Concrètement, on entend par Peuple du Nord toutes les ethnies qui s’étendaient jadis ou qui s’étendent encore au nord du globe. De la Laponie, le nord de la Finlande, la Sibérie, le Nord de la Mandchourie, la Mer d’Okhotsk, le Kamtchatka, le détroit de Béring, l’Alaska, le Nord du Canada, jusqu’au Groenland. Il n’est par ailleurs pas question de tracer de frontière précise, mais plutôt de donner une idée des régions concernées.
Quand on s’intéresse aux Aïnous, et plus particulièrement à leur origines, leur histoire anthropologique ou ethnologiques, nous pouvons tomber, comme nous l’avons vu dans la première partie, sur des théories et des hypothèses parfois très différentes. Mais ce qui nous intéresse ici concerne la pluralité et la diversité des ethnies qui vivaient dans le secteur.

Les Aïnous ont eu des contacts avec d’autres peuples, parfois voisins, parfois vivant sur le même territoire qu’eux (l’île de Sakhaline par exemple, voir en particulier la partie histoire de l’exposé). En s’intéressant à l’étude ethnologique ou linguistique de ces peuples, on constate souvent de grandes similitudes avec les Aïnous, mais aussi parfois des différences, sur leur culture, leur vision du monde par exemple. La figure suivante donne un aperçu des peuplades de ces régions.

(http://www.buta-connection.net/phpBB2/images-exposes/ainous4/1.jpg)
Figure 1 – Les peuples du nord du Pacifique

Mais s’il est un domaine où l’on prend particulièrement conscience de ces similitudes, c’est bien celui de l’artisanat, induisant presque une continuité culturelle depuis la Sibérie jusqu’aux côtes du Pacifique. Malgré les contacts avec les Coréens ou les Japonais, l’art aïnou est plus proche des styles nordiques, comme en témoigne par exemple l’utilisation de formes géométriques similaires sur les vêtements et les textiles en général, récurrente chez les Aïnous, les Nivkhs, les Oroks ou les Nanais (Ulchis). Quand on regarde la géographie de la région, et quand on sait que l’hiver venu, la glace recouvre presque complètement les bras de mer séparant Sakhaline du continent russe ou même de Hokkaidô, on imagine assez facilement la faisabilité des échanges culturels entre peuples voisins. On parle même parfois de culture d’Okhotsk dans le cas de ces peuples. Les systèmes d’écritures semblent absents de la plupart de ces cultures, ou alors introduit tardivement, voir récemment (début du 20ème siècle pour certains), plus dans un souci de survie de la culture qu’évolution naturelle : les Nivkhs ont ainsi utilisé l’alphabet latin pour retranscrire leur langue, avant de se tourner vers l’alphabet cyrillique. Le mode de subsistance semble, jusqu’au début du siècle dernier, le même pour tous, même si il est fonction de la géographie : les Oroks chassaient le renne et l’orque par exemple.


Les différences d’un peuple à l’autre se ressentent quand on change radicalement d’endroit, par exemple quand on passe du nord de la Mandchourie au Kamtchatka, où anthropologiquement et culturellement parlant, les traditions et modes de vies se rapprochent de ceux des Esquimaux du nord du continent américain, et des peuples des îles Aléoutiennes. Mais les Aïnous des îles Kouriles ont également accosté le sud du Kamtchatka, où ils ont pu là encore interférer avec des natifs de cette région, comme les Itelmens, dont les ancêtres auraient eu des contacts avec les ancêtres des Indiens d’Amérique. Pareillement, les chercheurs envisagent que les Aïnous et les Aléoutes (natifs des îles Aléoutiennes) eussent des contacts. Selon Patkanov, quelques Aïnous comprenaient (au sens où ils auraient appris) la langue des Aléoutes, qui est beaucoup plus proche de celle des Esquimaux que des langues de Sibérie continentale, et à fortiori de l’aïnou. En revenant à l’artisanat, certaines similitudes dans les techniques employées pour la manufacture d’objets tels les paniers ou corbeilles par des Esquimaux du sud-ouest de l’Alaska et des Aïnous sont presque identiques, tout en différant de celles de la culture d’Okhotsk.
La figure 2 présente deux motifs tissés sur le dos de vêtements, l’un aïnou, l’autre nanai. Dans ce dernier cas, on peut retrouver les traces d’une influence chinoise dans le dessin (design t’ao-t’ieh), en tout cas continentale (les Nanais vivaient dans la région de la rivière Amur). Les dessins sont dans les deux cas purement décoratifs, et ne représentent pas une divinité ou un animal en particulier. Le motif aïnou est une « spirale » (morew) avec des motifs d’épines, sensé protéger le porteur du vêtement des mauvais esprits, aux encolures ou points vulnérables par exemple.

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Figure 2 – Motif aïnou à droite, nanai à gauche : plus on s’éloigne du continent, plus la géométrie est présente.

On retrouve également des similitudes entre les cultures indiennes du nord-ouest du continent américain et aïnous dans les cultes traditionnels, comme par exemple les cérémoniaux liés au saumon. Démontrer, prouver ces contacts n’est pas une chose aisée, de par leur ancienneté. Cependant, dans le cas des Aléoutes par exemple, les similitudes observées pourraient découler de contacts beaucoup plus récents, quand les commerçants de fourrure Russes amenaient des chasseurs aléoutes depuis l’Alaska jusqu’en Sibérie. Notez que toutes ces similitudes concernent plus les Aïnous de Sakhaline et des Kouriles que ceux de Hokkaidô, beaucoup moins influencés par ces cultures du Nord de par le fait que leur milieu de vie n’avait pas les conditions de ceux des forêts boréales, même si son climat est souvent qualifié de subarctique, ou arctique doux.

Nos Voisins les Nivkhs :

Focalisons-nous un petit peu sur les Nivkhs, qui vivaient aux côtés des Aïnous (Sakhaline). Modes de vie et de subsistance semblable, on constate également une importance toute particulière accordée au chien. Elevés et utilisés comme moyen de transport, les chiens servaient non seulement pour des raisons économiques, mais aussi religieuses : les Nivkhs sacrifiaient des chiens aux esprits des Montagnes, de l’Eau, du Feu…L’univers est pour eux composé d’un monde supérieur, dans les cieux, d’un monde dit « milieu », l’univers des hommes, et d’un monde souterrain, celui des morts. Le monde des humains est divisé en trois parties, toutes sur un même niveau (vision horizontale) : le territoire des hommes, le monde de la Montagne (et/ou Forêt), et celui des Eaux (l’océan, la rivière). Chaque monde aurait son esprit, son Maître, se manifestant à travers les animaux par exemple : l’ours pour la montagne, l’orque pour l’océan. Les trois mondes sont liés par une relation d’échange : le Maître des Eaux envoient du poisson aux humains, celui de la Montagne envoie des Ours. Les humains donnent des fruits, et retournent leurs os aux créatures tuées et mangées par ces habitant qui partagent leur monde. Les animaux ne sont ainsi pas des divinités, mais des entités commandées par les Maîtres. Les Nivkhs, tout comme les Aïnous, ont un festival de l’ours, presque semblable. Mais au regarde de ce qui vient d’être développés, on comprend que les Nivkh célèbrent l’ours non pour l’animal en lui-même, mais pour son rôle de médiateur avec le Monde de la Forêt et de la Montagne. Les Aïnous, eux, vénèrent la divinité Ours. Une dimension sociale est aussi rattachée à ce festival chez les Nivkhs : pour les mariages, l’hommage faits aux ancêtres d’une même lignée… Les morts ne deviennent pas des divinités, et l’âme se réincarnent plusieurs fois, mais n’est pas immortelle (retour à l’état de plante, ou de poussières).

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Figure 3 – La pêche, principale activité économique des Nivkhs

Ces différences culturelles entre de si proches voisins, Aïnous et Nivkh suggèrent une incroyable diversité de concepts, de cosmologie, de cultures parmi tous ces Peuples du Nord. Le nord de la Sibérie voit ainsi une abondance de cultures liées à la forêt boréale, la chasse, la cueillette, le sédentarisme, tandis qu’au sud, dans les steppes, le nomadisme dominera, et l’on accordera moins d’importance par exemple au lien entre la religion et l’écologie qu’est l’animal. Moins égalitaires, les distinctions entre le bien et le mal sont accentuées.


Une destinée tristement commune

Tous ces peuples partagent une chose en commun : le destin que leur a réserve l’histoire. Toutes ces cultures sont en train de disparaître, et pour certaines, le cas des Aïnous est presque à envier. Les Russes, mais aussi les Chinois d’un côté, les colons américains de l’autre, ont provoquées la disparition progressive du territoire de ces populations. Décimées par la maladie, mais aussi la famine (notamment pendant la guerre civile en Amérique), l’alcoolisme, toutes ces populations ont diminuées en nombre. La fin du 20ème siècle à cependant vu le commencement d’une nouvelle ère pour les Natifs Américains, les Aïnous et beaucoup de minorités autochtones dans le monde. Luttes pour la préservation des cultures, de la diversité, la route est encore longue, espérons qu’elle aille dans le sens de l’humanisme.


Conclusion finale

Cette dernière partie vient conclure en quelque sorte cet exposé consacré aux Aïnous. Comme ce dernier, il n’a aucune autre prétention que de vouloir susciter chez le lecteur la curiosité, l’invitation à découvrir ces cultures du bassin du Pacifique Nord que l’on (nous ou les medias) a tendance à oublier parfois lorsqu’on s’intéresse aux civilisations et aux cultures de notre monde. En ce qui concerne les Aïnous, énormément de choses sont encore à dire, de pans culturels à développer, notamment l’art et l’artisanat. Il est intéressant de constater combien l’étude de la culture japonaise est fascinante, et surtout jusqu’où elle peut nous mener. Ne pouvant être exhaustif, nous espérons vraiment que ce qui a été suggérer dans cet exposé vous donnera envie d’en savoir plus.

Sources :

Internet :

http://www.eki.ee/books/redbook/ : un excellent site présentant tous les peuples et les langues parlées en Russie.

http://www.raipon.org/Web_Database/nivkh.html : une bonne introduction sur les Nivkhs.

http://nrsm.nsc.ru:8101/sibir/abor/aleut/aleutq.htm : le peuple des Aléoutes en quelques mots.

Bibliographie :

- Yamada Takako : The World View of the Ainu,2001, Kegan Paul.
- William W.Fitzhugh et Chisato O.Dubreuil : Ainu : Spirit of a Northern People, 1999, University of Washington Press.


Figures 1 et 2 : © William W.Fitzhugh et Chisato O.Dubreuil : Ainu : Spirit of a Northern People, 1999, University of Washington Press.
Figure 3 : © http://www.raipon.org/Web_Database/nivkh.html


Exposé rédigé par Jolan, Juin 2004
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 23 Août 2005 à 15:48
Je ne sais pas pourquoi les images ne marchent pas dans ce dernier post...  :mouais:
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Kianouch le 23 Août 2005 à 15:57
Tu fais du hotlink, et leur serveur doit être configuré pour le bloquer. Utilise ImageShack pour heberger les images et refais les liens ;)
(NB : je me réserve la lecture de tout ça pour quand je serais bien posé et non en train de bosser et surfer en même temps, ça m'a l'air bien interessant  :jap: )
Titre: Re : Histoire des Civilisations
Posté par: Amnounet le 23 Août 2005 à 16:01
Je n'ai pour le moment lu que la première partie avec beaucoup d'attention, mais comme Kian, je me réserve leur lecture pour des moments où j'ai un peu de temps devant moi ... ;)
Titre: Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 2 Janvier 2006 à 19:11
Les chroniques du tinou en visite au musee Guimet.

Le musee Guimet, c'est un musee qu'il est bien pour les gens qui veulent s'en prendre plein la vue niveau art  (si on peut qualifier d'art tout ce qui touche a la representation du religieux, mais ceci est un autre debat...) asiatique. Personnellement, la visite d'aujourd'hui a du etre la troisieme ou quatrieme dans ma vie. C'est toujours interessant car il y a toujours plein de trucs qu'on avait jamais vu auparavant, ou alors sous un autre angle, etc. Bon, mais aujourd'hui, j'ai quand meme remarque un truc pas si anodin que cela.

Si vous voulez, ce que j'aime dans ce musee, c'est qu'il reste juste et correct dans l'idee qu'il propose de l'Asie. L'immense Chine en est presque le centre nevralgique, et ce n'est vraiment pas etonnant vu la taille du pays, de son histoire, de sa culture. C'est un peu pareil pour toutes les sculptures sur pierre nous venant d'Asie du Sud Est a commencer par la vallee de l'Angkor. Pareil pour l'Inde. Au milieu de tout cela, le Japon occupe bien evidemment une place plus modeste, mais place quand meme. A sa juste valeur dira t-on, car bon, le Japon, aussi a la mode soit t-il, ne represente pas enormement quand on le ramene a l'echelle de l'Asie. C'est un peu comme si dans un musee consacre a l'art europeen, on ait beaucoup de peintures francaises, italiennes et flamandes, beaucoup de musiques allemandes, et puis une plus petite piece, mais piece quand meme, consacree au Luxembourg, ou au Portugal.

Mais la ou le bat blesse, c'est quand on se rend a la boutique du musee: le Japon occupe subitement une place quasi-preponderante! Presque tout ce qui est image, peintures ou autre sont domines par le diktat d'Hiroshige. C'est a peu pres la meme chose pour les livres avec beaucoup de  choses consacres au Japon finalement. Le Japon est bankable, ca on le savait a la rue Keller depuis des annees. On le lisait dans les boutiques de Naruto, on le mangeait dans les restaurants japonais tenus par des coreens et des chinois qui haissent pourtant le Japon. Meme si j'ai l'impression que dans tout ce qui touche a la peinture, le Japon a toujours occupe une place de premier plan dans le coeur des francais, cette nippo-mania generalisee me decoit quand meme parfois un peu, car elle eclipse bien des choses.

Le Nippo-fan que l'on croisait a cartoonist Toulon, garcon, mal rase, avec en general une activite des glandes sudoripares et sebacees assez notables, anorak a ski, sac a dos sur les deux epaules, sac en plastique plein de goodies et d'artbooks, cheveux longs, t-shirt Linux ou GNU en option... bon le specimen quoi, accompagne a l'occasion  de son grand voisin (ou voisine) maigre maitrosaixuail-goth-pouf-visual, et bien ces gens la, on les croise aussi maintenant au coin consacre au Japon (et je suis pret a parier que les fans du Nouvel Angyo Yoshi s'egarent parfois devant les masques coreens)! En tout cas j'en ai vu deux aujourd'hui...

Non mais moi je trouve ca bien!!! Il faut que les gens s'ouvrent un peu...

Ce que je trouve dommage, c'est au niveau de cette boutique...  :thumbdown2: Meme si il traduit une realite economique inherente a l'Asie: le Japon a economiquement beaucoup plus de sou que ses voisins pour exporter, et vendre sa culture.
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 3 Janvier 2006 à 15:13
Pas faux pour la boutique, du moins sur les présentoirs. Une fois que tu regardes les rayonnages, c'est tout autre chose.
Citation
(si on peut qualifier d'art tout ce qui touche a la representation du religieux, mais ceci est un autre debat...)
L'art est né avec la religion pour représenter l'invisible, c'est tout ;)

D's©
Titre: Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 3 Janvier 2006 à 17:56
Ben pour les rayonnages, pas tant que ca non... Beaucoup de choses consacrees a Kyoto, aux estampes, a la calligraphie japonaise...

Et bien moins de choses consacrees a la Chine uniquement. La plupart du temps c'est Asie, Orient...

Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Luna le 8 Mai 2006 à 02:17
Bon je me lance pour le Up de ce topic.  :sweatdrop:
Je suis en train de réécrire mon dossier sur le continent de Mu, et pour l'antithèse de mon dossier, j'ai besoin de renseignements concernant l'histoire de certaines civilisations. J'aimerai savoir si l'un d'entre vous est/connaitrait un historien/étudiant en histoire des civilisations afin de lui poser des questions qui m'aideraient à etoffer mon dossier et ainsi étayer ou bien réfuter les théories de James Churchward sur la potentielle existence du continent de Mu.

Merci d'avance à tous ceux qui pourront m'aider.
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 8 Mai 2006 à 11:32
Je vais voir ça de mon côté.

D's©
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Matsya le 9 Mai 2006 à 19:28
Citation de Luna le 8 Mai 2006 à 02:17
Merci d'avance à tous ceux qui pourront m'aider.
Pourquoi ne pas tenter d'écrire par mail à des profs de fac d'histoire et/ou à des musées ?
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 9 Mai 2006 à 19:54
Parce que tous ne partagent pas cette théorie. Je doute qu'un conservateur du presque-à-venir Quai Branly répondra à sa requête. Mais faut voir : http://www.quaibranly.fr/article.php3?id_article=967

Par contre, niveau prof... Hum, cherche donc sur les sites des facs s'il n'existe pas un annuaire.

D's©
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Luna le 9 Mai 2006 à 21:13
Merci pour le lien et pour l'idée Damien.
J'ai suivi ton conseil et viens d'envoyer une dizaine de mails en espérant avoir au moins une personne qui me répondra par la positive. J'ai déjà ce qu'il me faut d'un point de vue géologique (merci à RoiLion ;) et à Teejay) me reste plus que le point de vu d'un historien pour finir mon dossier.  :sweatdrop:
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Matsya le 10 Mai 2006 à 00:35
Tu pourras poster le lien quand tu auras fini stp ? :)
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Luna le 10 Mai 2006 à 08:42
Bien sur ;)
Ainsi vous pourrez me dire ce que vous en pensez.  :sweatdrop:
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: Matsya le 10 Mai 2006 à 14:37
Citation de Luna le 10 Mai 2006 à 08:42
Bien sur ;)
Ainsi vous pourrez me dire ce que vous en pensez.  :sweatdrop:
Tout à fait. :)
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 12 Mai 2006 à 09:26
Une bien triste nouvelle:
Citation
Les Aïnous restent sans voix au Japon
Shigeru Kayano, infatigable défenseur de la minorité opprimée, est décédé à l'âge de 79 ans.


Terrassé samedi par une pneumonie à l'âge de 79 ans, au terme d'un long combat contre la maladie, Shigeru Kayano, dit le «Mandela aïnou», pourrait bien s'avérer plus encombrant mort que vivant. A l'annonce de son décès, l'indifférence de grands médias japonais autant que le silence gênant de la classe politique et du Premier ministre Junichiro Koizumi ¬ qui a montré moins d'entrain à lui rendre hommage ce week-end qu'à faire savoir qu'il irait de nouveau, ce 15 août, au sanctuaire de Yasukuni honorer les «morts pour la patrie» ¬, en dit long sur le malaise suscité par la disparition de cet avocat pugnace des Aïnous, descendants lointains d'origine caucasienne des premiers chasseurs et cueilleurs aborigènes venus s'établir sur les terres du Japon. Seule l'ex-présidente du défunt Parti socialiste nippon, Takako Doi, a rappelé avec quelle détermination Shigeru Kayano, qui impressionnait les Japonais par son physique de géant, avait «porté sur ses épaules la fierté d'une minorité ethnique». L'épais silence qui entoure sa mort témoigne du sort réservé depuis longtemps aux Aïnous, peuple dépossédé de ses terres, aux droits bafoués, victime depuis des siècles de préjugés et discriminations. Les Aïnous ne seraient plus, selon certains, que 25 000. Ils seraient en fait six à sept fois plus nombreux. Mais pour mieux dégoter un emploi ou pouvoir se marier librement, beaucoup préfèrent aujourd'hui taire leur origine. Ou changer leur nom de famille. Conséquence indirecte non pas d'un apartheid planifié, mais des règles désastreuses de l'assimilation forcée.
Lois iniques. Ethnologue, historien, écrivain prolifique (il a écrit plus de cent livres), Kayano, leader emblématique des Aïnous, dont il a tiré du dialecte un dictionnaire, avait créé la surprise en 1994 en gagnant un siège de député au Parlement, à Tokyo. Devenu leur premier représentant politique officiel, il avait tenté d'éradiquer les lois iniques empêchant les Aïnous de préserver leur langue, leur culture et leurs terres. Mission alors impossible qui fit dire à certains que l'obtention miracle de son siège de député était une victoire à la Pyrrhus. Surtout contre-productive car très peu de députés japonais l'épaulèrent. Maniant la provocation, Kayano n'hésitait pas à poser aux députés japonais des questions en aïnou, dialecte que pas un élu, bien sûr, ne comprenait. En 1991, il avait tenté en vain de s'opposer à la construction d'un barrage sur des terres aïnous à Hokkaido. Un béton d'après lui symbole de «l'expropriation» dont son peuple était victime.
Recevant Libération chez lui en juillet dernier, malgré son état très affaibli, Shigeru Kayano livrait le fond de sa pensée. «Etre député fut une expérience intéressante. J'ai été en effet le premier représentant aïnou autorisé à siéger au Parlement japonais. Mais a-t-elle servi la cause des Aïnous ? Je ne le pense pas. J'ai l'impression qu'au contraire, mes années parlementaires ont été vaines. Malgré mes efforts, notre situation s'est détériorée. L'injustice à l'égard des Aïnous n'a pas cessé. Notre situation est pire même. Un Aïnou, un de ses descendants ou tout Japonais (e) qui se marie avec un (e) Aïnou est discriminé sur le marché du travail. Des Aïnous sont recalés à l'embauche à cause de leur identité, de leur apparence physique ou de la consonance de leur nom. D'autres sont recalés par des banques qui refusent de leur ouvrir un compte car ils n'ont pas d'emploi.»
Il ajoutait à voix basse : «Durant cinquante ans, j'ai lutté pour les miens, écrit des livres pour perpétuer la mémoire de mon peuple. Je suis un homme âgé et malade. Mais je continue d'écrire. Car les Aïnous ne connaissent plus la liberté. Cela fait longtemps qu'ils n'en ont plus. Depuis qu'ils ne sont plus autorisés à pêcher eux-mêmes leur poisson. Avant, nous nous nourrissions de saumons, de cueillette et de fruits des bois. Or, depuis de longues années, les Japonais pêchent tout notre poisson. Des millions de saumons par an. Et ils ne nous laissent que des miettes, quelques kilos de saumons pour tel village, tant de poissons pour tel autre village. Nous sommes prisonniers de ces quotas injustes.»
La «Loi de promotion de la culture aïnou» adoptée en 1997 au Parlement, dont Kayano était l'instigateur, n'aurait eu aucun effet positif selon lui. «Notre situation s'est dégradée. Nous n'avons plus de représentant au Parlement. Aucun moyen de faire entendre notre voix. Koizumi, comme tous les hommes politiques japonais, nous a abandonnés.» Kayano aurait bien vu son fils prendre la relève. «Il ne veut pas faire de politique. Il veut rester à Nibutani. Il veille sur notre musée qui renferme la mémoire de notre peuple.»
Années amères. Abritant des trésors culturels, des photos noir et blanc, des lithos et livres jaunis, d'anciennes sculptures sur bois de saumons, ours et hiboux ¬ animaux du panthéon animiste local ¬, le musée de Nibutani attire des touristes du Japon entier. «Dommage, fait remarquer Etsuko Kato, professeur d'université rencontrée près du musée avec ses élèves, que les traditions aïnous ne soient plus enseignées dans nos écoles.» Dommage aussi qu'en sortant du musée, les touristes ignorent que la maison en bois d'en face est celle du «héros» de la cause aïnou. Shigeru Kayano était revenu y vivre avec son épouse il y a dix-huit ans, après ses années amères au Parlement. Depuis son retour à Nibutani, qui a accueilli en 2005 le Congrès mondial des peuples autochtones, l'ethnologue écrivait sur les Aïnous, les ours (quatre essais) ou la splendeur du Hokkaido, ses schistes, rocs de granit, gorges, plaines, forêts et montagnes. Où daims et renards vivent en nombre en liberté.
Seul rayon de soleil ces jours-ci à Nibutani, la radio aïnou FM Pipaushi (littéralement «endroit riche en coquillages»), fondée par Kayano et que dirige son fils Shiro, émet dans le monde entier sur Internet. Elle passe en boucle les tubes du musicien Kanô Oki, pape du rock'n folk aïnou (en concert à Paris le 23 juin). Et héritier à sa façon de la cause ethnique.
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: iDam le 12 Mai 2006 à 09:34
Citation de tinou le 12 Mai 2006 à 09:26
A l'annonce de son décès, l'indifférence de grands médias japonais autant que le silence gênant de la classe politique et du Premier ministre Junichiro Koizumi ¬ qui a montré moins d'entrain à lui rendre hommage ce week-end qu'à faire savoir qu'il irait de nouveau, ce 15 août, au sanctuaire de Yasukuni honorer les «morts pour la patrie» ¬
Il faut sérieusement que les Japonais songent à éveiller un peu mieux leurs consciences et réorienter leur devoir de mémoire.
Citation
Elle passe en boucle les tubes du musicien Kanô Oki, pape du rock'n folk aïnou (en concert à Paris le 23 juin). Et héritier à sa façon de la cause ethnique.
Cet événement aura désormais une toute autre dimension (moi j'y serais volontiers :))

D's©
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 24 Juillet 2006 à 02:50
Avant-hier soir, BS2 a diffuse un documentaire de deux heures sur les Ainous sur la vie de Shigeru Kayano, leur porte parole. Deux heures pendant lesquelles on se rend compte que les Japonais ne connaissent rien de la question ainou, que leur langue est en train de disparaitre : on a vu le coffre fort dans lequel sont entasse les enregistrements de chants ; Shigeru Kayano lui meme n'etait pas fluent en Ainou (on le voit lire des discours en langue Ainou, c'est poignant). On reparle de l'affaire du barrage de Nibutani construit sur un territoire sacre et pour lesquels les Ainous ont gagne un proces.

En voyant les Ainous on constate vraiment une difference enorme avec les Japonais Wajin : pilosite, stature, etc.

Cette culture et surtout cette langue n'est helas pas la seule dans le monde a disparaitre.
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 7 Août 2006 à 14:01
Allez ouste! Au musee Branly!
Citation de ForumJapon
Pour les Parisiens, je signale qu'on peut admirer trois robes (deux grandes et une petite d'enfant) et quelques pochettes, faites de fibres végétales (de l'écorce d'arbre), et confectionnées par des Aïnous de l'île Sakhaline au XIXe siècle, avec les motifs géométriques caractéristiques de l'art aïnou, au musée du quai Branly.

Elles sont placées dans une petite salle consacrée aux peuples de la Sibérie, et cotoient des objets evenks et nivkhs, deux autres peuples de l'île Sakhaline. La présentation insiste sur le fait que les modes de vie des différents peuples de la taïga de l'Asie du Nord sont très proches (chasse et pêche).
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: tinou le 6 Septembre 2006 à 02:57
Un article assez sympa, malgre des partis pris un peu maladroit :

http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=44678
Citation
Voyage
PORTRAIT •  Un Polonais chez les Aïnous


Tous les Polonais connaissent Józef Pilsudski, maréchal et père de l'indépendance acquise en 1918. Son frère Bronislaw reste à découvrir. Au Japon, l'homme n'est pas inconnu : anthropologue avant l'heure, il a contribué à la renaissance des Aïnous, peuple aborigène des îles nippones.
   

   
Dans la grande encyclopédie polonaise, l'entrée Bronislaw Pilsudski occupe à peine neuf lignes et commence par la mention "frère de Józef". Les auteurs ont consacré 59 lignes à ce dernier, sans souligner qu'il s'agissait du "frère de Bronislaw". Ensuite, tout est mélangé. Les deux biographies se confondent et l'acte héroïque - l'attentat contre le tsar Alexandre III - est attribué à Józef ; pourtant, c'est bien Bronislaw qui a été condamné à mort pour cela. Peu de gens savent que Bronislaw a sauvé la vie du futur maréchal, son frère, en le sauvant de la noyade dans un étang ; ils étaient alors des enfants. Et l'on ignore presque tout sur les liens qui les unissaient à l'âge adulte.
A part leur nom, les deux frères n'avaient rien en commun. Józef, le cadet, était extraverti, envahissant et imposant, la bagarre et la guerre étaient ses éléments. Bronislaw, d'un an son aîné [né en 1866], était introverti, silencieux et romantique, et méprisait la violence. Leur jeunesse s'est déroulée selon un schéma propre à leur époque : éducation patriotique, conspiration, condamnation, déportation. En la matière, Bronislaw fut le plus actif. Il partit étudier le droit à Saint-Pétersbourg, où il fit partie d'un cercle de conspirateurs ; il fut très rapidement arrêté et condamné à mort avec le frère de Lénine. Celui-ci fut pendu, tandis que la condamnation de Pilsudski était commuée en quinze années de bagne. Józef fut également arrêté en tant que frère du conspirateur, et tous deux furent envoyés en Sibérie. C'est là qu'eut lieu la dernière rencontre entre les deux frères. Bronislaw atterrit dans le pire endroit qui pût exister : Sakhaline. Józef demanda - en vain - à le rejoindre afin de veiller à sa santé, qui était délicate. Tout porte à croire que les frères ne se sont jamais revus. L'étoile de Józef brille toujours, tandis que celle de Bronislaw commence à peine à sortir de l'ombre.

SAKHALINE ET LES KOURILES N'ONT JAMAIS ÉTÉ NI RUSSES NI JAPONAISES

Sakhaline est une formation géologique bizarre : une île du Pacifique longue de 1 000 kilomètres, dont la largeur ne dépasse pas quelques dizaines de kilomètres dans la partie la plus étroite. Elle constitue un prolongement naturel de l'archipel nippon et des îles Kouriles. Les relations russo-japonaises ont rarement relevé du bon voisinage. Sakhaline et les Kouriles ont changé de main à plusieurs reprises, mais, à vrai dire, elles n'ont jamais été ni russes ni japonaises. C'était la terre des Aïnous, comme l'Amérique était celle des Indiens.
Les Kouriles ont été découvertes au XVIIe siècle par Ignacy Kosarzewski, un Polonais au service des tsars (dans les sources, il figure sous le nom russifié de Kozyrevski). Les Russes y ont organisé une colonie pénitentiaire particulièrement dure. Anton Tchekhov en a fait une description poignante. Mis à part les prisonniers et les gardiens, l'île était peuplée d'autochtones, dont les Aïnous formaient le groupe le plus important. C'est parmi eux que Bronislaw Pilsudski a découvert le paradis sur terre. Le jeune déporté a tout d'abord travaillé comme charpentier, puis il est devenu météorologue. La mort du tsar Alexandre III, celui qu'il avait voulu tuer, et l'amnistie qui l'a suivie ont constitué un vrai bonheur pour Bronislaw. En semi-liberté, soumis à l'interdiction de retourner en Europe, il a trouvé un emploi de conservateur au musée régional de Vladivostok. Le juriste qui n'avait jamais pu obtenir son diplôme a trouvé là sa vocation : l'ethnologie. Sa rencontre, alors qu'il était encore bagnard, avec l'éminent ethnologue Lev Iakovlevitch Sternberg fut décisive. Sous sa tutelle, Pilsudski a acquis un savoir qu'on est en mesure d'apprécier aujourd'hui seulement, même si, à l'époque, l'Académie impériale des sciences avait reconnu ses qualités : le jeune chercheur s'était vu attribuer la mission d'exploration des peuples de Sakhaline. Il a commencé ses recherches par les Nivkhes, connus aussi sous le nom de Ghilaks, puis son intérêt s'est porté sur les Orotches. Les deux peuples avaient des origines mongoles. Ensuite, il s'est pris de passion pour les Aïnous, un véritable phénomène ethnologique.

 Qui sont les Aïnous ? En dépit des recherches menées depuis deux siècles, les scientifiques n'ont toujours pas de réponse sur leurs origines et ils n'ont pu établir aucune filiation entre les Aïnous et un quelconque autre groupe ethnique. La découverte de ce peuple, au tournant du XIXe siècle, a fait sensation. Quelques-uns de ses représentants ont même été montrés comme curiosité à l'Exposition universelle de Londres, en 1910. Mais la science n'a pu percer le mystère qui les entourait. Désarmés, certains scientifiques ont élaboré les théories les plus fantasques. Les uns ont vu en eux une tribu disparue d'Israël (les Juifs d'Extrême-Orient ?), les autres les survivants d'une civilisation engloutie... En revanche, les Aïnous n'ont pas de doute quant à leurs propres origines. "Nous venons du Cosmos, envoyés par ceux qui habitent dans les nuages et qui dépêchent sur la Terre des soucoupes volantes." Ils montrent même les pistes d'atterrissage.
A quand remonterait leur arrivée ? On l'ignore. Ce qu'on sait, c'est qu'ils peuplaient l'archipel nippon, les Kouriles et Sakhaline depuis la nuit des temps. Les ancêtres des Japonais ont envahi le territoire aïnou à partir de la péninsule coréenne ; ils étaient primitifs, sanglants, haïssant tous ceux qui étaient différents. Et, chez les Aïnous, tout était différent. A commencer par leur morphologie. Ils n'appartiennent pas à la famille mongole ; ils sont blancs. Si l'on note aujourd'hui chez eux quelques traces mongoles, c'est la conséquence d'une longue colonisation japonaise. Elancés, dotés d'une bonne ossature, ils ont de grands yeux, non bridés, qui furent jadis bleus, paraît-il. Ils n'ont jamais développé d'écriture, même s'ils ont transmis oralement une riche littérature épique. On aurait ignoré tout cela si Bronislaw Pilsudski n'avait pas été là pour le décrire.

LES JAPONAIS DÉTRUISIRENT LES AÏNOUS AVEC UNE CRUAUTÉ BARBARE

Les Aïnous menaient une vie simple liée à la beauté - peut-être à cause de leurs croyances religieuses : ils étaient animistes. Ils trouvaient des éléments divins dans les forces de la nature, dans tout être vivant, mais aussi dans les objets qu'ils fabriquaient. C'est pourquoi la moindre chose devait être décorée pour avoir une âme. Le monde devenait harmonieux si la beauté intérieure de l'environnement créé par l'homme communiait avec la beauté de la nature, domaine des dieux... (Aujourd'hui, on appelle cela l'écologie.) Ils entraient en contact avec les dieux par des prières chantées que les chamans appelaient les "youkara". La vie des Aïnous était une suite de fêtes sans fin. La pêche, la chasse, l'artisanat, la construction, toutes ces activités étaient prétexte à réjouissances. Vêtus de costumes d'une rare beauté, ils dansaient en suivant un rythme soutenu. Parfois, ils se réunissaient en cercle pour écouter, en se tapant sur le ventre, une femme raconter des légendes, et cela pouvait durer plusieurs jours.
Les Russes exterminèrent les Aïnous d'abord aux Kouriles, puis à Sakhaline. Ils le firent froidement, avec un mépris hautain à l'encontre des "sauvages poilus", comme ils les appelaient. Les Japonais détruisirent cette civilisation avec une cruauté barbare. Jusqu'au début du XXe siècle, leur propagande présenta les Aïnous comme des sous-hommes primitifs, des hybrides issus du croisement d'un chien et d'une princesse mongole, et possédant une queue. Ils les pendaient par les cheveux, qu'ils portaient longs. Les Japonais pratiquèrent la politique des traités truqués, ils usèrent de ruses, de poisons. L'alcool et les maladies vénériennes, auparavant inconnus chez ce peuple, les décimèrent. Aujourd'hui, les Japonais se sentent redevables envers les Aïnous et ils font de réels efforts pour les aider.
Revenons en 1902. Le jeune ethnologue Pilsudski loge dans la meilleure cabane, chez le chef du village aïnou de Bafunke-Ainou. Il tombe amoureux de la nièce du chef, Chuhsama. La cérémonie de mariage n'est guère compliquée : les fiancés se regardent droit dans les yeux et consomment un même plat. Pilsudski entre ainsi dans la communauté aïnoue. Ses arrière-petites-filles sont toujours en vie. Malheureusement, la lignée masculine est éteinte.

 En 1903, Pilsudski part en mission scientifique sur l'île d'Hokkaido, accompagné d'un compatriote, ancien déporté lui aussi, l'écrivain et ethnologue Waclaw Sieroszewski. Munis d'une caméra, d'un appareil photo et d'un phonographe, ils recueillent ce que l'on considère aujourd'hui comme les archives les plus importantes de la culture aïnoue. Sujets du tsar, ils sont priés de quitter le Japon à l'approche de la guerre [russo-japonaise de 1904-1905]. (Notons que, dans les bibliographies russes et soviétiques, les deux chercheurs figurent en tant que Russes, sans la moindre mention de leur nationalité polonaise.) Sieroszewski profite de l'occasion pour retourner en Pologne, c'est-à-dire en Galicie, où, dans un livre intitulé Chez les hommes poilus, il décrit ses pérégrinations au sein du peuple aïnou. Pilsudski revient à Sakhaline, non par loyauté envers le tsar, mais pour rejoindre sa famille. Après la victoire du Japon, la partie sud de l'île, où il habite, est occupée par les troupes nippones. Il prend la décision de partir. Les anciens ne lui permettent pas d'emmener son épouse, d'autant moins qu'elle est enceinte. Le 11 novembre 1905, Pilsudski quitte Sakhaline pour toujours. Il ne verra jamais sa fille Kiyo, qui naîtra après son départ.
Il séjourne d'abord au Japon, où il mène une vie sociale et politique très active. Plus tard, en faisant des détours par l'Amérique et par la France, il rentre en Pologne, en Galicie. Il vit à Cracovie et à Lvov avant de se fixer définitivement à Zakopane, dans les Tatras. Quand la guerre éclate, en 1914, il se réfugie à Vienne, puis en Suisse et enfin à Paris. Il tente de récupérer ses enregistrements, restés à Zakopane. On lui fait savoir qu'on ne les retrouve pas. Le 21 mai 1918, un homme tombe dans la Seine depuis le pont Mirabeau... Un suicide ? Une de ces crises de somnolence dont il souffre depuis son retour en Europe ? Le mystère persiste. En 1930, lors de la rénovation de son ancienne maison, à Zakopane, on découvre des coffres contenant 80 boîtes cylindriques en carton, remplies de rouleaux de cire complètement moisis. Les propriétaires de la maison font preuve d'ouverture d'esprit et ne jettent pas le tout à la décharge. C'est ainsi qu'ont été retrouvés les enregistrements de musique aïnoue faits par Pilsudski à Sakhaline et à Hokkaido. Mais plus personne n'était capable de les lire. Finalement, les boîtes ont été déposées dans les caves de l'université de Poznan, où elles ont dormi pendant cinquante ans. Entre-temps, un jeune linguiste, Alfred F. Majewicz, est parti en stage au Japon, où il a raconté l'histoire des enregistrements, seules preuves vivantes d'une culture pratiquement disparue.
Depuis l'époque de Pilsudski, les Japonais ont bien changé. Ils ont redécouvert les Aïnous [en 1993, 24 000 individus officiellement, en fait environ 100 000], reconnus comme phénomène ethnologique unique, et se sont mis à reconstituer leur culture, désormais à la mode, à partir des bribes qui en restaient. Grâce à Majewicz, les rouleaux sont retournés sur l'île d'Hokkaido. Et, dans les années 80, les ingénieurs japonais ont construit un lecteur laser pour pouvoir lire ces enregistrements. Les Aïnous retrouvrent une identité propre. Ils renaissent à une vitesse étonnante. Certains manuels scolaires, au Japon, citent Bronislaw Pilsudski comme le plus grand Polonais. Pour eux, Józef, le maréchal, n'est que son frère.
Stefan Szlachtycz
Je trouve cet article tres bien ecrit, ca ferait presque un bon film...

Sinon un article de l'excellent cereal killer(http://"http://isanatori.blogspot.com/") sur Forum Japon(http://"http://www.forumjapon.com/forum/index.php"):
Citation de cereal killer
Salut,

Dans le prolongement de l'initiative d'Aristarque, je voudrais evoquer une collection de peintures conservees (mais pas exposees, malheureusement) au Musee des Beaux Arts et d'Archeologie de Besancon.
Il s'agit de la serie Ishû-retsuzô 夷酋列像 de Kakizaki Hakyô 蠣崎波響 qui compte les portraits de douze chefs ainous (onze hommes et une femme. Seulement 11 portraits sont conserves a Besancon, le douzieme a probablement ete detruit a cause d'un etat de deterioration avance) des regions de Menashi (Est de Hokkaido) et Kunashiri (Kouriles).
Cette serie de portraits a une valeur assez particuliere car elle a ete realisee a la suite d'une revolte d'Ainous connue sous le nom de revolte de Kunashiri et Menashi.

Contexte historique
Nous sommes a la fin du 18e siecle, l'ile de Hokkaido n'a pas encore ete completement colonisee par les Japonais. Le clan Matsumae dont la base est situe dans le sud de l'ile a le monopole des echanges commerciaux avec les Ainous. Ces echanges permettent aux Japonais d'obtenir des fourures ou des plumes d'oiseaux mais egalement des robes chinoises aux motifs de dragons et de nuages appelees Ezo-nishiki 蝦夷錦. Celles-ci proviennent des echanges que les Ainous entretiennent avec le continent, notamment via Sakhaline.
Ce commerce nippo-ainou genere d'importants benefices pour le clan Matsumae. De nombreux postes de commerce et de peche existent le long des cote d'Ezo (Hokkaido) de facon a faciliter ces echanges. En mai 1789, les Ainous des regions de Kunashiri et Menashi se revoltent contre ce qu'ils considerent etre des injustices commises par les marchands japonais. A cette occasion, ils tuent la totalite des Japonais presents, soit 71 personnes. Averti de ces emeutes, le clan Matsumae envoie 260 hommes dans cette region, mais plutot que de recourir a la force, il prefere s'en remettre a la mediation en faisant appel aux chefs ainous locaux. L'enquete menee par le clan revella bien les mauvais traitements et les injustices commises par les Japonais a l'egard des Ainous, mais les 37 Ainous ayant participe au meurtre des 71 Japonais furent condamnes et decapites.
Les 12 chefs ainous qui ont servi de mediateur au clan Matsumae ont prefere sacrifier leurs semblables (pour certains leurs fils) pour eviter un conflit ouvert avec les Japonais. Cet incident demontre en quelque sorte la domination que les Japonais commencaient a avoir sur le peuple ainou.
Pour l'anecdote, les Ainous de l'est de Hokkaido continuent aujourd'hui de prier a a memoire de leurs 37 camarades et des 71 Japonais assassines.

(http://www.aaa-www.net/~sapporo/file/002-1-0055p6.jpg)
Portrait d'Ikotoy chef d'Akkeshi, serie Ishû-retsuzô.

Les portraits
Outre le detail des dessins et l'expression des visages, les premieres choses qui frappent l'oeil lorsque l'on regarde ces portraits sont les tenues des 12 chefs ainous. En effet, ils portent quasiment tous ces robes de hauts fonctionnaires chinois dites Ezo-nishiki, chose inhabituelle puisque les Ainous ne revetaient que rarement ces tenues. En fait, on pense que ces Ezo-nishiki ont ete rajoutes ulterieurement de facon a magnifier la representation des chefs ainous, et par consequent a renforcer l'aura du clan Matsumae auquel ils obeissaient. Cette serie est donc certainement empreinte d'une signification politique a l'attention du pouvoir shogunal.
Tout comme dans la plupart des representations japonaises d'Ainous, les douze chefs sont decrits de facon accentuer l'impression de barbarie de ce peuple dans l'imagination des Japonais : bras et jambes velus, cheveux ebouriffes, petites prunelles, etc.
Je precise que Kakizaki Hakyô etait l'un des dignitaires du clan Matsumae. Il n'a plus jamais fait de portraits d'Ainous apres cette serie.

Sources :
TAHARA Kaori, " Réflexions sur une série de peintures sur soie de Kakizaki Hakyô représentant des chefs ainu ", in Japon Pluriel 5. Actes du cinquième colloque de la Société française des études japonaises,
Arles, Éditions Philippe Picquier, 2004.
(J'ai egalement vu un reportage sur cette serie de portrait sur la NHK education le mois dernier, mais je ne me souviens pas du nom...)
Titre: Re: Histoire des Civilisations
Posté par: squekky le 21 Février 2007 à 11:55
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3244,36-868965@51-866443,0.html(http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3244,36-868965@51-866443,0.html)

Je sais pas si je suis dans le bon sujet. Si ce n'est pas le cas que les modos n'hesitent pas à le déplacer.

Bon pour ceux qui ne sont pas au courant, Marseille est encore plus vielle. Plus serieusement ces decouvertes confirment toutes les intérogations des archéologues sur la ville de marseille. Pour beaucoup d'entre eux la ville etait bien plus vielle que ce qu'on pensait. Et ces derniers cette nouvelle découverte permet de verifier leurs suppositions.

Donc le parc du XXVI centenaire hop obsoléte.  :mdr: